Ouro Preto, cité orphique, par Nathalie Hannecart, photographe

©Nathalie Hannecart

La créativité, l’inventivité, la liberté, qui se manifestent aujourd’hui dans l’autoédition photographique, ne manquent pas de m’enthousiasmer.

Dernière merveille en date, Orfeo, de Nathalie Hannecart, fanzine aussi beau que des azulejos sur la façade d’une église baroque.

Présenté sous pochette peinte à la main, cet ouvrage est une évocation d’un territoire brésilien considéré au 17ème siècle comme un Eldorado, tant le précieux minérai jaune y était abondant.

©Nathalie Hannecart

Nous sommes dans l’Etat fédéré du Minas Gerais, plus précisément dans la ville d’Ouro Preto, ville riche, densément peuplée, objet de tous les fantasmes.

Ayant périclité à la suite de l’abandon des mines d’or, les filons étant taris, la cité a conservé son passé colonial quasi intact.

Nathalie Hannecart a erré dans cet espace fascinant, y faisant le portrait de trois sœurs inséparables depuis quatre-vingts ans.

©Nathalie Hannecart

La totalité des tirages est en cyanotype, la teinte bleue conférant à Orfeo une idéalité presque fantastique.

Que nous disent les murs, les surfaces, les objets d’un passé éloigné ?

Sont-ils des vigies, gardiens de mémoire muets quand les humains ont perdu à peu près tout souvenir ?

L’individualité se dissout-elle dans la lumière qui unifie ?

©Nathalie Hannecart

Orfeo regarde des mains ridées, des églises, des enfants, et le décor des collines sous lesquelles se déploient la vie humaine, la foi, le mystère.

Dans ses images se présentant sous la forme de tessons de mosaïque, mouvements et stases se côtoient.

Visages de plusieurs générations, fer forgé des balcons, pavage, prêtres en soutane.

Le catholicisme n’est pas ici un vain mot, Oura Preto est une ville protégée que parcourt le personnage récurrent d’un enfant au visage d’ange pasolinien.

©Nathalie Hannecart

Heure de la messe, heure de la bière, heure du repas, heure de la sieste.

Graffitis, croix, portraits en médaillons.

Nathalie Hannecart photographie son propre paysage intérieur au contact du tout-autre.

Ce sont des rencontres, des manières d’occuper un territoire, des signes meubles et intangibles, une sensualité qui touche.

Le cyanotype confère aux pages une matière onirique qui sied bien à ces lieux où les strates temporelles se superposent.

©Nathalie Hannecart

Il y a quelque chose ici d’un inconscient visuel où se mêlent expressivité, silence et sensation de l’ailleurs.  

Les images sont des affixes composant des phrases inédites.

Ouro Preto est là, mais réinventé, magnifique façon de rendre hommage à cette ville considérée comme un organisme vivant et protéiforme, telle une chimère.   

Nathalie Hannecart, Orfeo, soutien graphique Aurélie Bay et Collin Hotermans, Namur, première édition, 2025 – 50 exemplaires

©Nathalie Hannecart

https://www.nathaliehannecart.be/

Nathalie Hannecart et Aurélie Bay ont organisé à Namur, du 29 mai au 1er juin 2025 le premier salon du fanzine et de l’autoédition, un rendez-vous désormais incontournable pour les passionnés d’édition indépendante

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