Au temps de la parousie, par Juan Manuel Castro Prieto, photographe

le

©Juan Manuel Castro Pietro

Que se passe-t-il à l’instant où nous fermons les paupières ?

Que voyons-nous lorsque nous cillons, ou que ne voyons-nous pas que l’appareil de vision se substituant à notre œil contemplera ?

Avec Sucedio entre dos parpados, publié de façon très élégante en format carnet vertical de moyenne dimension par Ediciones Anomalas, Juan Manuel Castro Prieto livre ses esquisses, qui sont des images impeccables relevant des épiphanies théâtrales.

©Juan Manuel Castro Pietro

Pour bien voir, il faut probablement mourir : première scène d’une présence cadavérique allongée sur le sol, dans un couloir menant à une porte en verre translucide.

Juan Manuel Castro Prieto photographie des extases, discrètes ou négatives, dans un baroquisme s’élaborant aux lisières du fantastique.

Il y a de la surréalité ici, une attention portée à la volupté des formes, une façon de mesurer le degré des substances à l’aune du rêve éveillé.     

©Juan Manuel Castro Pietro

La lumière structure l’espace, les ombres n’étant pas moins métaphysiques que les clartés éphémères se posant sur tel ou tel objet posé dans l’espace.

L’artiste met en scène des fantasmes, afin de probablement s’approcher du mystère de sa psyché.

Qu’est-ce qu’un photographe de nécessité ?

Un initié cherchant dans le visible les signes de l’invisible, et dans l’invisible les signes du visible.

©Juan Manuel Castro Pietro

Il faut tenir bon sur la méthode, être ferme dans les cadrages, ne pas craindre d’ouvrir le ventre de cire d’une statue féminine pour admirer l’écheveau de ses entrailles.

Véronique a fait tomber son voile, Christ est un visage sur une latte de parquet reflété par un miroir.

Au pays de Buñuel, où la mort est plus franche qu’ailleurs par la coupure nette opérée sur les corps par le soleil brûlant, Juan Manuel Castro cherche davantage la douceur et la fulgurance des transfigurations, jusque dans le beau étrange (Edgar Poe), plutôt que l’implacable tragédie et la sensation de néant.  

Comportant quatre parties, séparées par des signets blancs, Sucedio entre dos parpados assemble ses images en des séquences d’impressions colorées, jaunes ou bleues ou brunes ou grises, sans que le découpage soit strict puisqu’il serait artificiel de dissocier radicalement les spectres.

Une femme nage sur le dos en fermant les yeux, bras étendus en position sacrificielle.

Est-elle enceinte ?

Porte-t-elle en son giron la venue du dernier dieu (prophétie de Martin Heidegger à la fin de sa vie) ?

©Juan Manuel Castro Pietro

Il faut se préparer, inventer quelques actes de dévotion, vider les salles de dissection et les vitrines des muséums d’histoire naturelle, pour que la place soit vacante quand se présentera l’Œuvre ultime. 

Chers enfants qui jouez dans la ruine de vos maisons, attendez tout de la fin du monde.

Nous sommes au temps de la parousie, un photographe espagnol penché sur les clous de ses visions vous le montre avec grâce, prenez-en conscience. 

Juan Manuel Castro Prieto, Sucedio entre dos parpados, texte (espagnol/anglais) Antonio Anson, graphisme underbau, Ediciones Anomalas, 2024, 80 pages

https://agencevu.com/photographe/juan-manuel-castro-prieto/

https://www.edicionesanomalas.com/en/producto/sucedio-entre-dos-parpados-3/

Laisser un commentaire