Avec les gitan.e.s des Saintes-Maries-de-la-Mer, par Jeanne Taris, photographe

©Jeanne Taris

La ville des Saintes-Maries-de-la-Mer est aussi décevante, bétonnée, artificielle, tournée vers le tourisme de pacotille, que fascinante par son sanctuaire érigé en forme de forteresse où les Gitans vénèrent leur patronne, Sara la Noire dite La Vierge Noire, et la présence d’un espace ornithologique d’une très grande beauté à quelques mètres des dernières habitations.

Fréquentant cette ville populaire depuis son enfance, Jeanne Taris, lauréate du prix du livre Escourbiac – Fondation des Treilles 2024, a conçu Gestes gitans, ouvrage relevant à la fois du reportage immersif et du regard fraternel sur un peuple admiré.

Il y a une liberté gitane, qui est ferveur, qui est exaltation de la vie, qui est profondeur de culture.

©Jeanne Taris

Chaque printemps, au mois de mai, on porte la statue de sainte Sara jusqu’à la mer Méditerranée pour sa bénédiction.

Jeanne Taris est là, qui observe, qui se fond dans la communauté.

« Sur ses photos, précise Françoise Huguier qui signe la postface de son livre, on voit qu’elle fait vraiment corps avec les pèlerins. On y voit des gens transpirer, pleurer, chanter, crier, et pour cela il faut être très proche ; ce n’est pas au téléobjectif qu’elle aurait pu faire ses images. Sur ses photos, c’est comme si elle n’était pas là, il n’y a plus de distance ; sainte Clara l’a aidée à disparaître. »  

©Jeanne Taris

En couverture de Gestes gitans, deux petites filles regardent sans ciller l’objectif, ce sont les enfants de Diane Arbus, et peut-être aussi les siens, tant l’ensemble des images donne la sensation que Jeanne Taris fait partie elle aussi de la famille gitane.

Cet enfant qui court, c’est la photographe il y a quelques années.

Eloge des corps en leur singularité, éloge du partage, éloge du secret.

 Jeanne Taris photographie au plus près, elle est au contact, très naturellement.

Peaux bronzées, tatouées, Jésus le sacrifié est là.

Chaises en plastique à deux pas des caravanes, câbles électriques, vie effervescente.

©Jeanne Taris

Toutes les générations se côtoient, on joue, on se dispute, on se regarde, on s’inquiète.

Présence forte des femmes, des enfants, des hommes, de chacun des membres de la communauté.

Le terrain que circonscrivent les caravanes fait office de place du village, tout s’y passe.

Le plein air rend beau, c’est une évidence quand l’on n’est pas seul et que l’on peut se loger en préservant une part d’intimité.

Gestes gitans est une fête, de l’altérité, de la capacité à vivre ensemble, de l’indocilité.

©Jeanne Taris

Au cœur du livre, ayant bénéficié du talent de Lionel Catelan pour le design graphique, les guitares chantent, les corps dansent, le feu crépite.

Ce feu préservé est le génie d’un peuple, où chaque individu compte à égalité.

Un peuple en larmes quand la Vierge de miséricorde passe devant lui.  

Jeanne Taris, Gestes gitans, postface Françoise Huguier, direction éditoriale Gilles Cargueray & Camille Gallet, direction technique Alain Escourbiac, direction artistique Camille Gallet, Lionel Catelan, design graphique Lionel Catelan, photogravure Christian Boënnec, relecture Catherine Guichardon, Editions Odyssée, 2024

https://www.jeannetaris.com/

https://www.editionsodyssee.com/gestesgitans

©Jeanne Taris

Prix Escourbiac / Fondation des Treilles

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