La porte est à l’intérieur, par Isabelle Vaillant, photographe

©Isabelle Vaillant

Les photographes, de plus en plus impécunieux, font des projets, des dossiers, des résidences, des restitutions de résidence, des animations scolaires, des ateliers, des discussions en public, des interventions diverses, et serrent beaucoup de mains.

En regardant de nouveau, à l’occasion de la parution du volume 48° Nord (Les Editions de Juillet), l’oeuvre d’Isabelle Vaillant, il me plaît d’oublier quelque peu la notion de commanditaire, de partenariat public, privé, ou semi-public, semi-privé, pour me délecter du seul rayonnement de ses photographies. 

©Isabelle Vaillant

Isabelle Vaillant en deux mots et phrases nominales ?

Une attention à la brume, aux paysages en retrait, à la pudeur des lieux.

Une attention à la façon dont l’humain se tient, souvent de guingois, dans son environnement familier, donnant l’impression de danser sa vie, entre précarité et soutien des morts.

Une attention à la façon dont l’espace se structure et se géométrise.

Une attention aux enfants, aux animaux, à la part inentamée en chacun, c’est-à-dire celle sur laquelle la société, au fond, n’a pas de prise.

©Isabelle Vaillant

Isabelle Vaillant ?

Une présence discrète mais essentielle, doublée d’un sentiment d’errer dans sa propre vie sans véritablement s’égarer.

La conscience d’une instabilité féconde, ontologique, et que le prochain coin de rue réserve la plus belle des aventures.

Une contemplation empathique et stupéfaite de la comédie humaine jamais regardée avec moquerie ou morgue critique.

©Isabelle Vaillant

La recherche des points d’ouverture, de liberté, d’échappée : fenêtres, grands dehors, béances diverses.

Le corps saisi en ses fragments, ses points de contact – mains, jambes, cou…

Les signes mystérieux déposés sur les murs, sur la terre, sur les peaux.

©Isabelle Vaillant

Isabelle Vaillant ?

Une communication directe avec les personnes qu’elle rencontre.

Une compréhension intuitive de l’unité multiple parfaite nous constituant.

Le peau à peau comme Eden, l’amitié, la tendresse, l’amour.

Jouer sa vie plutôt que de chercher, ô horreur, à la gérer ou à la rentabiliser.

©Isabelle Vaillant

Enfouir la tête dans les végétaux.

L’arrivée par flux incessants des émotions, les ondes du territoire.

La solitude et le partage.

La complicité immédiate avec le pleinement vivant.

©Isabelle Vaillant

Si Isabelle Vaillant était née en Corse, elle aurait probablement été une de ces mazzéri faisant brûler des jonchées d’immortelles, à la nuit tombée, le 31 juillet ou le 1er novembre, afin d’apaiser les morts, mais elle est photographe, ce qui n’est pas si loin.

Isabelle Vaillant, 48° Nord, conception éditoriale Isabelle Vaillant et Richard Volante, graphisme Yves Bigot, Editions de Juillet / Les Ailes de Caïus, 2024, 92 pages

https://www.editionsdejuillet.com/products/48-nord

©Isabelle Vaillant

https://lintervalle.blog/2023/02/04/le-sacre-de-la-vie-par-isabelle-vaillant-photographe/

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