
©Dimitris Mytas
Quand le chérubin quitte le nid pour partir faire ses études, les parents sont souvent désemparés.
Il était là, on ne voyait que lui, il prenait toute la place, c’était un éléphant dans une maison de poupée.
Ou alors, on ne s’en rendait pas compte, mais l’enfant était omniprésent.

©Dimitris Mytas
Je ne connais pas le nom du fils de Dimitris Mytas, mais on pourrait l’appeler du titre de son livre publié en collaboration avec Zoetrope Athens, Elephant.
Pour conjurer l’absence du pachyderme, le photographe a plongé dans ses archives, concevant un ouvrage pensé comme objet de transformation, du chagrin en acte de création.
Couverture sérigraphiée à rabat, reliure suisse, qualité des papiers, rien n’est laissé au hasard pour célébrer le divin enfant.

©Dimitris Mytas
Dans un noir et blanc superbe, Dimitris Mytas fait surgir de sa mémoire des scènes et objets qu’il se plaît à représenter, métamorphoser ou métaphoriser, montrant son propre égarement et sa sensation de solitude, accrue par le blanc des pages.
Tu vois la lumière là-bas ? est-ce lui, est-il revenu ?
Bébé déjà, il s’échappait, notre beau sauvage.

©Dimitris Mytas
Le photographe explore à la fois un espace circonscrit peuplé de vide, et les méandres de son inconscient.
C’est Icare tombé cherchant à rejoindre le soleil de son enfant.
Une foule est là, dans une salle de spectacle, qui est-elle ? qui sont ces juges paraissant affolés ? quelles sont les émotions qui les étreignent ?
Tout se brouille dans les vortex cérébelleux.

©Dimitris Mytas
On expérimente des casques, des prothèses sous-marines, des machines étranges : peut-être est-il possible de communiquer à distance, comme nos ancêtres les Atlantes, simplement par le pouvoir de la pensée.
Nous sommes concrétion d’images, mais surtout ondes, vibrations, énergie.
Elephant invente un territoire où la science rejoint la surréalité, parce que nous n’avons pas encore les moyens de comprendre tout à fait ce qui nous lie, dans l’atemporalité et l’acausalité.

©Dimitris Mytas
Poussières d’êtres, taches, structures.
Plume abandonnée, graffitis, stries.
Le livre de l’artiste grec est un huis-clos, une hétérotopie, un sarcophage ouvert.
S’il pense au passé, il construit surtout les conditions d’un avenir, d’une transmission, comme une nef pour traverser la perte, le mal, le deuil.

©Dimitris Mytas
Elephant ne livre pas ses secrets, il faut ouvrir des portes, ne pas hésiter à se perdre, écrire ce texte, comme un chemin de clarté dans la nuit des significations multiples.
Quand l’éléphant s’en va, tout est à reconstruire, pour, de nouveau, le réaccueillir.

Dimitris Mytas, Elephant, editing and book design Dimitris Mytas, Lamprini Kosma, Yorgos Yatromanolakis, cover artwork Andreas Petroulakis, photographs processing Anestis Kyriakides/Graphicon, publié en collaboration avec Zoetrope Athens, 2024 – 400 exemplaires numérotés
https://www.instagram.com/zoetrope.athens/?hl=fr

©Dimitris Mytas