En Sibérie, avec le BAM, par Agnès Courrault, photographe

©dumas.salchli editions Arles & Agnès Courrault

« A—t-on assez senti la boue glissante / entre les doigts de pieds / où les ongles poussent / à travers la peau ? // Plus au nord / passent des hommes / bleus de givre // en Sibérie » (Sylvie Durbec)

Le septième volume de la belle collection Photo Zine dirigée par Corinne Dumas pour les éditions Dumas.Salchli est confié à la photoreporter, mais aussi peintre et poétesse de l’image, Agnès Courrault.

Son livre intitulé Magistrale Amour Baïkal évoque la célèbre ligne ferroviaire russe BAM parcourant la Sibérie et l’Extrême-Orient russe.

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« Les premiers tronçons, explique la photographe, ont été construits par les prisonniers : 180 000 détenus, 10 000 morts. J’ai vécu dans ce train pendant plusieurs semaines suivant la Route vers le Staline Goulag, camp de Marble dans les montagnes du Kodar. Dès 1949, des prisonniers y ont extrait l’uranium lié à l’histoire de la création des premières bombes atomiques soviétiques. Le camp a fermé l’automne 1951 et garda le secret pendant 40 ans. J’y étais comme reporter au début de la Glasnost. »

On embarque donc pour la taïga et les montagnes de ces confins russes, dont on ignore généralement, de ce côté-ci du monde, à peu près tout.

Paysages monotones et durs, où l’habitat, même précaire, est essentiel pour ne pas mourir de froid.

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Des enfants nous regardent derrière une fenêtre, les couleurs sont fades ou passées, mais la vie est là, collective, familiale, modeste.

Conifères, vodka, landaus.   

Ciels gris interminables, brumes, jardins potagers.

Agnès Courrault compose ses images comme on construit un tableau : sens du cadrage, des lignes, des échos de couleurs.

De l’eau, de la terre, des nuées.

Une impression de haute solitude.

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De la minéralité.

Des cabanes, des sortes de fortins : pour se protéger de quels Indiens ?

La photographe parvient à saisir quelques trais essentiels de l’âme russe, et soviétique : des symboles, des attitudes, des formes, des matières, une iconographie spéciale.

Le train continue sa route, l’œil est cinétique.

Arrêt sur image : voici le conducteur d’une équipée dans le vaste Estern.

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Magistrale Baïkal-Amour est une rhapsodie bleue, verte et grise.

Un parfum d’autrefois, de ce passé qui ne passe pas vraiment.

Une femme déclare : « La Russie vaste ventre où creuser sa tombe. »

Vie-mort, mort-vie, survie.

Du courage.

Bam, bam, bam, fait le cœur, et le ventre de la locomotive.

Agnès Courrault, Magistrale Baïkal-Amour, texte Sylvie Durbec, design Yann Linsart, Dumas.Salchli Editions, 2025, 32 pages – 250 exemplaires numérotés comprenant une photographie signée / 10 exemplaires – édition spéciale – comprenant une photographie numérotée et signée par l’auteure

https://dumassalchli.com/products/agnes-courrault-magistrale-baikal-amour-photo-zine-7

Special edition prints Françoise Galeron

https://dumassalchli.com/products/agnes-courrault-magistrale-baikal-amour-photo-zine-7-special-edition

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