Le nouvel amour, par Chloé Mons, chanteuse, comédienne, écrivain

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© Chloé Mons

« Il s’en passe des choses, quand on est vivante. Vraiment vivante. »

Avez-vous remarqué comme les hommes (identité de genre) se montrent la plupart du temps pusillanimes lorsqu’ils rencontrent une femme exceptionnelle, comme ils peinent à s’engager, comme ils calculent ?

Ils peuvent coucher dès le premier soir, peut-être, mais leur âme n’est pas convoquée, bien protégée par le confort des fonctionnements ordinaires.

A la jonction de Gena Rowlands et de Monica Vitti, mais aussi dans le miroir de Bette Davis la belle insolente, il y a Chloé Mons, actrice, chanteuse, et grande amoureuse si la gent masculine lui offre par miracle de se défaire de sa carapace.

Elle a aimé, totalement, Alain, un grand artiste, l’a accompagné vers l’autre monde (lire Let go, Mediapop Editions, 2019), sans oublier ensuite de vivre, par fidélité, par respect pour la chair même de l’existant, pour la gloire des femmes libres.

Ne craignant pas la sincérité, Chloé Mons a écrit Jachère (Mediapop again), autoportrait au prisme des hommes, les observant, s’observant.

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© Chloé Mons

Incipit : « Je suis une femme en jachère. Depuis la mort de mon mari, les herbes folles poussent n’importe comment aux quatre coins de ma vie. J’ai beau essayer d’organiser ce jardin, de défricher, de couper, de planter, rien n’y fait. C’est un grand chaos qui semble devoir être à tout prix. Alors me voici tout à l’exploration de mon cœur et de mes amours, au passé, au présent et au futur. Mais où est le cavalier blanc ? »

Aimant les vastes battements de vie, jusqu’aux chutes de solitude, l’amazone Mons n’est pas une chaste vestale, mais une femme sauvage traquant la bête dans l’espoir d’y découvrir le beau.

Flux de vie, énergie, merveille du présent.

« Les pierres précieuses. Dans mon sac, toujours une poignée de cailloux. Parfois même quelques-unes dans mon soutien-gorge. Turquoise, pyrite, quartz rose, pierre de lune, citrine, cristal de roche. Une petite montagne pour monter respirer quand j’en ai besoin. »

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© Chloé Mons

Chloé Mons aime les hommes, ceux qui changent brusquement de vie parce qu’un regard les a foudroyés, ceux qui ne doutent pas bêtement, ceux qui croient aux extra-terrestres.

Le texte de ses amours est beau, cru, absolu.

Après la mort de l’aimé, un premier amant éblouissant, puissant, Sénégalais devenu fou de possession, voulant retenir  à toute force la femme à la chevelure blonde (erreur majeure) : « En tant que femme-plante, en tant qu’organisme vivant, je n’ai jamais été aussi heureuse, aussi épanouie, aussi comblée. Enduite de vie comme ces plantes grasses qui semblent vibrantes et chaudes au toucher. » 

L’axiome est double : ne retenir que le meilleur / croire « aux fils d’or tissés sous la surface ».

Par exemple avec Tom, le photographe américain (il a 48 ans, elle en a 15) rencontré en Inde : « Cet homme m’aura appris tout ce que doit savoir une maîtresse, tout du plaisir, tout du désir, tout de l’image. »

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© Chloé Mons

Par exemple avec Oscar : « Oscar gentil et doux. Moi un peu cruelle avec lui. Injuste même. Il vient dans mon appartement rue Charlot. Il me baise sur le canapé, je prends mon pied à chaque fois, comme une voleuse. Après je veux qu’il dégage. »

Avec le barman, avec l’Italien, avec l’homme à la jambe de plastique, avec Sylvain, avec Avec.

Pas de fausse pudeur, pas de cache-sexe, pas le temps pour les mièvreries.

Pas de jalousie, mais de l’exclusivité.

De courts chapitres, des souvenirs sans pesanteur, des preuves de vie pleine.

Des anecdotes, des dingueries, des rires.

Un fakir, un catcheur, des pervers.

Un chanteur flamand aux idées sublimes – finalement décevant : « Un soir où nous sommes dans la maison de mes parents à Audinghem sur le Cap-Gris-Nez, nous prenons un renard empaillé et nous sortons dans la nuit. Là, nous le déposons sur la route et nous attendons les voitures et leurs réactions. Le renard reprend vie dans les phares. Planqués dans un buisson, nous hurlons de rire. Surréalisme belge. Une façon d’inventer la vie, comme j’aime. »  

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© Chloé Mons

Le mystère du père, de la mère, du frère, ces noyaux durs.

Les hommes défilent, ils sont pitoyables, drôles, désespérants, tout petits, rarement sublimes – Jachère est un observatoire.

Quand ça ne va pas, ou moins bien, Chloé Mons, amoureuse de Cassavetes et des films du patrimoine, se soigne au noir, aux salles obscures, à la poésie du cinéma muet, au bigger than life.

« Je voudrais une rencontre de train comme dans La Mort aux trousses. Eve Marie Saint et Cary Grant, un wagon-restaurant. »

Quand l’époque n’est plus aux dîners ferroviaires.

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© Chloé Mons

Avec Alain, elle a chanté pour toujours le Cantique des Cantiques, la chaleur du vertige des baisers de l’amour : « La nuit j’ai toujours froid aux bras. Même dans les pays chauds, je finis toujours par enfiler un pull ou un tee-shirt à manches longues, entre deux sommeils. Alain disait que c’était parce que mes bras étaient des sources. »

Une femme en jachère, ou, pour le dire comme Plotin, « s’efforçant de faire remonter le divin qui est en nous vers le divin qui est dans le Tout », par le cul s’il le faut, dans le flux des énergies mêlées et l’abandon rare.  

« Je suis une chasseuse de terrain. J’aime sentir les attractions qui surviennent dans la vie. En cas de grande dalle, je préfère traîner dans un bar à la recherche de sensations vraies, ou faire une proposition très concrète à un commerçant qui m’attire, plutôt que de lancer des flèches dans le vide infini de la toile que tissent les réseaux. Une fille à l’ancienne quoi. »

En racontant sa vie sexuelle, son éditeur craignait que Chloé Mons, femme publique, ne s’expose trop. Bien au contraire, Jachère s’avère un livre de protection, parce que sans tricherie ou petites manigances avec les aveux.

Un bonheur, comme un verre de Chasse-Spleen, ou un mantra inventé pour sa fille, Poppée : « La peur n’existe pas. Nulle part. Ni sur la Terre, ni dans la galaxie, ni dans l’infini de l’univers. La peur on la fabrique tout seul, alors on peut la détruire tout seul. Avec les lumières de l’art et du savoir, de l’amour et du rire, parfois juste avec une musique. On la pulvérise. »

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Chloé Mons, Jachère, Portrait en mouvement, Mediapop Editions, 2020, 176 pages

Mediapop Editions

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