Météorites, a song for Stella, par Emilia Martin, photographe

©Emilia Martin

La couverture du livre de l’artiste visuelle polonaise Emilia Martin au titre d’abord étrange, I saw a tree bearing stones in the place of apples and pears, fait songer à la fois aux volumes Jules Verne de la collection Hetzel de notre enfance, et à la gravure sur bois (anonyme) concernant l’astronome français Camille Flammarion, le représentant traversant le ciel tel un pèlerin mystique.

Il s’agit par cette image de dimension ésotérique de se demander ce que nous cache le visible, et comment, intérieurement, nous pouvons soulever les voiles nous masquant le réel.

Le dedans est le dehors, le dehors est le dedans.

©Emilia Martin

La présence du grand autre cosmique est manifeste dans ces roches tombées du ciel, dans nos jardins, dans nos campagnes, sur nos églises : les météorites, dont la reconnaissance officielle, nous rappelle l’autrice, date de la fin du XVIIIe siècle.

Graphiquement très beau, cet ouvrage publié par Yogourt Editions invente une relation, parfois finement drôle, avec ces fragments stellaires.

Il y a un cratère dans le champ, ce ne peut être l’œuvre d’un renard, un géant a dû passer par là, semeur de cailloux.

©Emilia Martin

La voie lactée est constellée de points de lumière. Et si toutes ces brillances tombaient d’un seul coup sur notre sol ?

La chasse aux météorites est une passion populaire – voir le travail sur les scientifiques amateurs mené en Bretagne par la photographe Florence Joubert -, on repère des signes, on les traque, on veut connaître les mystères de l’univers.

Sommes-nous sur Terre ou sur quelque planète inconnue parcourue de vers énormes soulevant le sable, comme dans Dune, de Frank Herbert ?

©Emilia Martin

Les images de I saw a tree bearing stones in the place of apples and pears sont en noir et blanc et surtout en nuances de gris, les pages pouvant évoquer les manuels de science d’autrefois.

Dis, la météorite que tu portes dans les bras, n’est-ce pas plutôt une sculpture de Jean Dubuffet ?

Ces pierres chues sont-elles à considérer comme des reliques témoignant de l’espace sacré qu’est l’au-delà ?

©Emilia Martin

Emilia Martin imagine une pierre posée sur un oreiller, comme un enfant des astres se reposant sereinement après un long voyage.

Tenue dans la paume de la main, rayonnant magnétiquement, celle-ci semble une pépite d’or.

Prenant quelquefois l’allure d’un cabinet de curiosité, l’ouvrage ovni possède de noirs secrets, c’est une cosa mentale qui étonne, effraie un peu, et enchante.

©Emilia Martin

L’artiste collige des images d’archives, tout est d’essence mythologique : il est possible que nous ne restions plus très longtemps sur Terre, il va nous falloir remonter à la source, choisir quelque exoplanète, nous éveiller intérieurement, aller plus loin que les pollutions.

Par ses mises en scène subtiles, son travail de collectage, et la tendresse fascinée que la photographe porte au minéral, I saw a tree bearing stones in the place of apples and pearsnous enjoint à ne pas oublier d’où nous venons : du plus profond de la nuit et de l’inconnaissable.    

Emilia Martin, I saw a tree bearing stones in the place of apples and pears, text Emilia Martin, book design Francesco Rombaldi, cover artwork Mattia Ammirati, Yogourt Editions, 2024  – 700 copies

https://www.emiliamartin.com/

©Emilia Martin

https://yogurtmagazine.com/prodotto/i-saw-a-tree-bearing-stones-in-the-place-of-apples-and-pears-by-emilia-martin/

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