Littérature vivante, par Yves Debraine, photographe

Jacques Chessex ©Yves Debraine Je montre souvent à mes élèves des portraits d’écrivains, parce que les textes ne sont pas faits que de mots, mais de la chair, arrachée, transposée, sublimée, réinventée, des auteur.e.s. Montrer un visage, une attitude, une posture, aller chercher dans les archives, la bibliothèque, la photothèque, et maintenant dans le livre…

Comme une cravache, la vie flagelle, par Mireille Havet, écrivaine

James Ensor « Une terrible, une animale, une dévorante sensualité est en moi, pesante et gluante jusqu’à mes doigts avides de se faire plus insinuants de caresses, de posséder, de faire chanter un corps de femme, une chair miraculeuse et savoureuse comme celle de Madeleine. » Mireille Havet, merveille, mirabilia, Ave Maria pour toutes les lesbiennes du…

Entrer dans la couleur, par la revue Edwarda

La joie de vivre, 1905, Henri Matisse « Mon premier signe de grossesse n’a pas été les seins énormes, tendus à bloc, le teint resplendissant, pêche de vigne, les nausées H24, les 80 ans ressentis, l’addiction au sucre et au gras, l’envie de chialer pour un oui pour un non, le flair d’un chien de chasse,…

La bella estate, par Sébastien Berlendis, écrivain

©Sébastien Berlendis « Les larges baies baignent la chambre de lumière, éclairent Annabella endormie, sa chemise aux fleurs mauves, aux motifs japonais ; le miroir, qui couvre la surface entière du mur face au lit, agrandit l’espace. Ses lèvres gercées par les plongeons et les bains de mer quotidiens, ses fesses plus blanches que son corps blanc,…

La vie en feu, par Hélène Laurain, écrivain

Un incendio, 1793, Francisco de Goya « Laeti oh / les flics finissent par ouvrir le premier portail / je pisse un peu quand je vois qu’ils ouvrent déjà le deuxième / adrénaline / on se rend les mains en l’air / on n’est pas des cow-boys / ils se jettent sur nous quand même /…

Un dandy dans le Berry, par Frédéric Berthet, écrivain

  Maison près d’Orléans, 1830, Jean-Baptiste Camille Corot « J’ai, à Paris, deux amis écrivains de mon âge qui gagnent entièrement leur vie grâce à ce qu’ils écrivent. Ce qui paraît évident, irait-on supposer qu’un plombier gagne la sienne en disputant des tournois de tennis, ou inversement, mais il paraît que, dans le cas précis des…

Résonance, une révolution musicale, par Hartmut Rosa, philosophe

« La racine anthropologique du capitalisme réside dans le prométhéisme et la non-acceptation des limites. (…) Ultimement, le postcapitalisme ne peut advenir que sur fond de notre finitude anthropologique marquée par la mort. » (Nathanaël Wallenhorst) Dans L’homme pressé (1941), Paul Morand écrit, prophétique, après Paul Valéry et avant Paul Virilio : « La vitesse est la forme moderne…

Juste un corps, par Claude Arnaud, écrivain

Photomaton, collection de Claude Arnaud « Je peux énumérer les causes qui précipitèrent la Seconde Guerre mondiale, non celles qui me valurent une hernie hiatale. » (Claude Arnaud) Comme me l’écrit aujourd’hui le peintre et graveur Roland Sénéca, dans un courrier posté accompagné d’un dessin : « Vous verrez quand vous serez vieux, c’est formidable une vie de vieillard,…

L’amour des lettres, par Frédéric Berthet, romancier, épistolier

« Si je ne dormais pas, quels romans n’écrirais-je pas. D’où l’insomnie. » (Frédéric Berthet, 31 janvier 1978) J’avais besoin d’intelligence, de style, de vraie-fausse désinvolture, d’une vie habitée par la nécessité de l’écriture. J’avais besoin de Frédéric Berthet (1954-2003), de me souvenir de ses livres (Simple journée d’été – présenté récemment dans L’Intervalle -,…

Ouvrir les portes, Venise à double tour, par Jean-Paul Kauffmann, écrivain

Dans son dernier récit, Venise à double tour, Jean-Paul Kauffmann raconte une obsession : se faire ouvrir les dizaines d’églises fermées de Venise, généralement pour des raisons absconses, mystérieuses, ou tout simplement oubliées par les protagonistes eux-mêmes de la fermeture des portes. A travers un livre mené comme une enquête, placé sous la haute protection…

La couleur des yeux de Paul Gauguin, par Serge Airoldi, écrivain

« Dionysos est parfois mis en scène chevauchant des juments bleues. » Parce qu’elles sont le fruit d’une culture libre et sauvage – et non en pot, comme le disait ironiquement Nicolas Bouvier -, certaines œuvres sont immédiatement des fêtes pour l’esprit. Ainsi Rose Hanoï, de Serge Airoldi, herbe folle poussée entre les pavés de…

Pauvres poètes travaillons, Blaise Cendrars en toutes lettres

L’intérêt exceptionnel de la correspondance de Blaise Cendrars (1887/1961) à Jacques-Henry Lévesque (1899/1971), son fidèle secrétaire d’édition et premier lecteur, est de permettre de suivre, pas à pas, l’auteur de L’Or dans l’élaboration de chacun de ses livres. Au fil du temps, Jacques-Henri Lévesque passe du statut de simple admirateur à celui de commentateur de…