Sur le plan clinique, tout va bien, par Franck Landron, photographe

©Franck Landron

« Il faut se laisser aller à regarder ce livre sans but, rejeter l’ordre (comme il a raison !), tourner les pages de la vie, respirer les images, pleurer ou rire, sentir l’amour, laisser un regard vous transpercer, on en redemande, vivre… » (Bernard Plossu)

Franck Landron ne veut pas s’ennuyer.

Après le volume en noir et blanc de ses premières années de photographe, Ex Time, livre de 376 pages édité chez Contrejour en 2015, paraît, cette fois aux Editions Loco, mais essentiellement en couleur, son pendant, le non moins volumineux In Time, dont la couverture est un montage de tirages réalisés par Jean-François Fresson.

©Franck Landron

A détailler le colophon, on se rend compte que cet opus est une affaire de famille (Zoé, Félix et Dominique Landron sont crédités), ce qui donne la mesure de l’ensemble : ne pas vivre séparés, célébrer les siens, œuvrer de concert, remercier l’instant qui nous réunit.

On trouve d’ailleurs, inséré dans l’ouvrage, outre un livret de seize pages mentionnant les légendes, un cahier de recettes de cuisine disant tout du tempérament rabelaisien de l’artiste.

Ne surtout pas disjoindre l’art de la vie, la photographie étant vécue par Franck Landron comme la continuation naturelle de son appétit d’ogre.

©Franck Landron

Menu : pâté de cèpes en souvenir de Régis Marcon, saucisson brioché de mémé Oger, lotte à la vanille, riz au lait de mamie Coquelicot.

Vivre à poil – Franck Landron est naturiste -, déshabiller un lapin, ne pas s’embarrasser des petitesses sociales.

On prend des coups, on se blesse, le ciel est sombre, mais il y a l’art, les éclaircies, l’amitié, l’amour, le sexe.

©Franck Landron

Il y a les voyages et la polychromie de l’existence, les tarmacs et la banquise bleutée.

Pas de hiérarchie, tout est photographiable quand tout swingue.

La mort est repoussée (premières images), la vie n’attend pas, ni les jolis petits seins de nos ami-e-s.

Sourires, grimaces, chapeaux de paille.

Bus cahotants, touffeur, pitons rocheux.

©Franck Landron

Afrique, mousson, abattoirs de plein air – récurrence du sang, perdu, arraché, comme un vaste memento mori.

Tout est électricité, ivresse, expériences.

Musique, rythmes, moteur de la caméra et de l’aéroplane.

On regarde des tombes, des croix plantés dans l’espace – une même image, prise à différentes saisons et époque ponctue le livre -, on a compris la leçon, il faut renaître sans cesse.

Maternité, grands-parents, yeux dévorant le monde, comme papa.

©Franck Landron

On grandit, on se confie des secrets, on ne veut pas être un adulte (un poulet pendu par les pattes).

Les dinosaures courent après les gringos, Cuba est un cinéma permanent, on nage entre les requins.

In Time fait la fête, célèbre la paysannerie, prend du poids (tout est si bon), s’embrasse sur la bouche.

Son irrévérence n’est pas irrespectueuse, c’est une éthique de la déprise : ne pas se laisser attirer par la glu sociale, savoir se dégager à temps, savoir être solidaire (séquence d’images plus directement politiques du côté des misérables d’aujourd’hui, loin de la pestilence pétaino-nationaliste).

Prête-moi ton dentier, mon frère ; attention, Sphinx d’Egypte, tu as encore perdu un bout de nez ; attention, Madame l’Indienne, vous perdez votre sari.   

©Franck Landron

Franck Landron, qui est humaniste, internationaliste, et tantriste, aime aussi peindre – pourquoi se contenter d’un seul médium quand la vie foisonne à ce point de formes et de pratiques possibles ? -, In Time reproduisant dessins et aquarelles de son auteur.

Il y a un trou dans le mur, c’est sûrement une issue de secours, n’oubliez pas de vivre, tout passe si vite.

Franck Landron, In Time, textes Bernard Plossu et Sandra Mercœur, direction éditoriale Eric Cez, conception graphique du livre et maquette Zoé Landron & Franck Landron, conseil informatique Felix Landron, Editions Loco, 2024, 384 pages – 800 exemplaires

https://francklandron.fr/bio-3/

©Franck Landron

https://www.editionsloco.com/livre/in-time/

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