
©Jane Evelyn Atwood
Adaptation d’une nouvelle d’Arthur Miller, The Misfits, de John Huston (1961), est l’un des plus beaux films de l’histoire du cinéma.
C’est la fin de l’âge d’Or d’Hollywood, la fin du mythe de l’Ouest, la fin des troupeaux de chevaux sauvages, promis à l’abattoir afin d’être transformés en nourriture pour chiens.
Une femme crie, à son mari (le novelliste), à la société américaine, à la psychiatrie, à toute son existence blessée, à l’enfant qu’elle n’a pas eu, c’est Marilyn Monroe, libre, intacte, s’élevant contre trois hommes au nom des valeurs sacrées de la vie.
Laissez libres les mustangs, ou mourez tous de votre indignité.
Les chevaux, symboles d’une présence supérieure, les voici, magnifiques, solitaires ou ensemble, chez Jane Evelyn Atwood, que l’on ne connaissait pas dans ce registre du vivant – son travail sur les prostituées de la rue des Lombards à Paris et les enfants aveugles, notamment, sont célébrés.

©Jane Evelyn Atwood
Photographe au long cours, l’auteure de Darya (Le Bec en l’air, 2022 – présenté dans L’Intervalle) a photographié, dans différents territoires (île d’Ouessant, Vermont, Mongolie, Pologne, Belgique, Camargue) sa relation avec le cheval, faisant songer au regard si beau de Michèle Le Braz sur le noble animal.
Le corpus est en noir et blanc, les paysages de steppe offrent aux quadrupèdes un espace rappelant celui des pionniers, le vent dans les crinières évoque la part d’irréductible et d’instinct que nous n’avons pas su garder.
Les chevaux de Jane Evelyn Atwood sont des personnages, royaux ou burlesques, toujours sublimes.
La photographe s’approche des robes, des yeux, des naseaux, des échines.
L’amour pour l’animal est perceptible, il n’y a pas de tricherie, mais un contact direct, d’être à être.
La puissance de ses sujets princiers est soulignée, dont on ressent la capacité à nous piétiner en cas de danger.

©Jane Evelyn Atwood
Ruades, roulades ; fougue, douceur.
- Qui êtes-vous, Madame, pour ainsi chercher à capturer notre image ?
- Je suis comme vous, bêtes géniales, mais en un peu moins bien, forcément. Vous m’accorderez bien un pas de danse ?
Horses, chantent Patti Smith et PJ Harvey, qui écrit : « Horses in my dreams / Like waves, like the sea / The pull out of here, / They pull, they are free »
Jane Evelyn Atwood a souvent photographié la vie âpre, difficile, bancale.

©Jane Evelyn Atwood
Ses photographies de chevaux sont un contrepoint à la société malade, une façon de s’extraire de la nécrose générale.
Etre accepté par la gent chevaline vaut certificat de pleine humanité.
Domestiqué ou libre, tournant dans les écuries de Chantilly ou galopant dans la neige, le cheval est tout simplement pour l’artiste un miroir de vérité.

Jane Evelyn Atwood, Horses, édition Jordan Alves, design graphique Coline Aguettaz, relecture Florian Berrouet, fabrication Charlotte Debiolles, François Santerre, Atelier EXB, 2024, 128 pages
https://exb.fr/fr/home/652-horses.html
http://www.janeevelynatwood.com/
