© Nicolas Floc’h
« Les paysages de l’Aber-Vrac’h marquent le début des zones exceptionnelles du Finistère. Dans cet environnement abrité, les grandes algues se déploient, les forêts sont immenses et luxuriantes. A l’Aber-Vrac’h se situe l’unique site d’élevage d’ormeaux en milieu naturel nourris avec les algues locales. »
Mené en partenariat avec Arconnexion, la Fondation de France, l’université de Lille, Ifremer, le Muséum national d’histoire naturelle, la Région Bretagne, et quelques autres structures impliquées dans la recherche sur la recherche et la défense de l’environnement, Initium Maris (GwinZegal Editions) est une expédition scientifique prenant pour cadre les côtes bretonnes – et le Japon (presqu’île d’Izu) -, dont le premier volume est paru en 2020.
A bord du ketch OAO (ne pas confondre avec un yawl), acquis en novembre 2018 à Calais, Nicolas Floc’h, enseignant à l’EESAB (site de Rennes) et par ailleurs plongeur émérite, s’est donné pour mission de dresser une typologie des paysages sous-marins français, ici bretons, entre Saint-Malo et Saint- Nazaire, après avoir notamment documenté les Calanques.
© Nicolas Floc’h
Il ne s’agit surtout pas de séparer art et science, mais de renforcer le pouvoir de l’un par l’autre, en établissant une sorte d’état des lieux ou d’inventaire d’un paysage en évolution sous la pression de l’activité anthropique.
Concordant involontairement avec le travail d’Aurore Bagarry sur les roches des côtes de la Manche, en France et en Angleterre – la surface/le fonds, le fonds/la surface, le fonds dans la surface, la surface dans le fonds -, présenté aussi par GwinZegal, maison d’édition sise à Guingamp très attentive à la notion de territoire et d’ancrage, Initium Maris propose des images en noir et blanc éblouissantes.
Apparaît une jungle sous-marine presque tropicale, traversée d’éclats de lumières, des signes végétaux parlant une langue pour l’essentiel inconnue.
Des sables ou des neiges ? Des algues ou des chevelures ? Des roches ou des peaux ?
© Nicolas Floc’h
Quarante-cinq sites et zones côtières bretonnes ont été explorées, précisément situées (lieu, profondeur de plongée, température de la mer, coefficient de marée), les photographies de Nicolas Floc’h donnant des laminaires, sargasses et roches observés une impression de civilisation engloutie, encore secrète.
« Arriver en mer d’Iroise est toujours une émotion, les paysages terrestres rugueux et battus par les vents contrastent avec l’exubérance sous la surface. La diversité des algues, leur immensité nous rappellent les forêts primaires. Elles sont gigantesques, magnifiques, les eaux transparentes, c’est un émerveillement où habite littéralement certaines descriptions des paysages sous-marins de l’île Crespo de Jules Verne. Ouessant est vertigineuse et dynamique, Molène surprenante et lumineuse. »
Les scientifiques savent sans nul doute interpréter ces images, dont la dimension archéo-poétique ne peut également que ravir les esthètes et amateurs de royaumes étranges.
Une croix sous-marine.
Des herbiers de zostère à perte de vue.
© Nicolas Floc’h
La présence des goémoniers.
Le ciel est ici une étendue de voile liquide aux ondulations très sensuelles.
Il y a des cascades végétales exceptionnelles, un paysage fantastique nourrissant un imaginaire se rappelant les gravures accompagnant les ouvrages Hetzel.
Au Japon, les kamis semblent aussi vivre sous l’eau, formes incroyables de grotesques vivants.
La merveille gît encore ici, dont il s’agit de prendre conscience pour parvenir, peut-être, à la protéger.
Préserver la biodiversité n’est pas qu’une obsession d’écologues, c’est aussi une nécessité esthétique, tant les formes inouïes de la nature dans sa diversité peuvent enrichir en chacun la capacité à inventer autrement les lignes de sa vie.
Nicolas Floc’h, Initium Maris, Carnet de bord 2019, 1/3, auteurs Nicolas Floc’h et Sylvain Agostini, GwinZegal Editions, 2020 – une production Arconnexion et la Fondation de France dans le cadre de son programme « Les futurs des mondes du littoral et de la mer »
Nicolas Floc’h est représenté par la galerie Maubert (Paris) et la galerie LMNO (Bruxelles)