Gaston Chaissac et l’esprit CoBrA, une exposition à Rodez

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Gaston Chaissac

Nous luttons tous, plus ou moins, contre la dépression.

Le feu est là, encore, mais parfois trop faible pour aller jusqu’à l’esprit.

Les plaisirs du sexe peuvent le ranimer, ou le dilapider.

Il nous donc faut la joie, l’esprit d’enfance, la réinvention du quotidien.

Il nous faut Gaston Chaissac et CoBrA, soit Chaissac&CoBrA, exposition – et catalogue chez Gallimard – actuellement présentée au musée Soulages de Rodez, comprenant une centaine d’œuvres réunies pour la première fois en France.

L’artiste aux sabots dessine ses personnages fantasques partout, sur des bouts de carton, des portes d’écurie, des bancs d’école.

Placée « Sous le signe du serpent », l’exposition ruthénoise, coproduite avec le Kunstmuseum Den Haag (La Haye), est un bain de jouvence.

« Les audaces formelles et chromatiques, souligne Alfred Pacquement, président du musée Soulages, les références aux arts premiers, aux dessins d’enfants des artistes de CoBrA trouvent un écho dans l’œuvre d’un marginal autodidacte comme Gaston Chaissac. »

Chez Chaissac comme chez Carl-Henning Pedersen, les yeux sont grands ouverts – parfois un peu mélancoliques -, l’apesanteur n’étant pas forcément de mise.

La liberté s’exprime en couleurs, en traits enfantins, en formes contournées.

« De l’enfance instinctive à un ascétisme tourné vers l’accomplissement de son œuvre, la quête de liberté et le refus de se conformer à aucun dogme auront été le fil conducteur de Gaston Chaissac, explique sa petite-fille Nadia Raison-Chaissac. »

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Karel Appel

Chaissac comme Karel Appel inventent des totems pour attirer à eux les forces vives de l’univers, et envoyer dinguer le faux-sérieux adulte.

Ça joue du chapeau, ça écarte les jambes en des sauts périlleux, ça crie pensée magique, et détresse du temps contrée par la puissance propitiatoire de l’art.

Il y a chez Constant et Corneille comme chez Chaissac des oiseaux, des hiboux, des chats-tigres, des espèces d’ânes, des animalcules, tout un peuple ayant besoin d’intermédiaires humains pour apparaître sur la toile, ou la page, ou n’importe quel support.

Pas d’idéologie, de perspectives politiques assommantes, mais du carnavalesque, de la fête des fous, des échappées dans la drôlerie des balais volants, des osiers prenant la parole et des pierres sculptées bavardes comme des céramiques aux mille bouches.

La matière s’insurge, déclare sa noblesse, c’est la rage et le rire de l’expression.

Chaissac vit en Vendée, Alechinsky et consorts travaillent à Copenhague, Bruxelles et Amsterdam (acronyme de CoBrA), la volonté est de se décentrer de Paris.

Picasso, Miro et Klee sont de saints patrons, comme le découvreur Dubuffet, mais il y a mieux encore que l’histoire de l’art, le vent dans les arbres, les cailloux du chemin, la terre de la campagne.

Revenir aux sources vitales de l’être, calligraphier sa vie en des signes étranges, dessiner, à la façon d’un Balzac sauvage, la comédie sociale de toujours.

En ses amis du Nord de l’Europe, Chaissac le solitaire, l’autodidacte curieux de tout, a trouvé un appui de choix, des frères en inspiration adeptes comme lui des productions de l’automatisme psychique et de la science du trait.

Mais le serpent ? La conservatrice Angelika Affentranger-Kirchrath s’en explique : « Qu’il soit motif, symbole ou emblème, le serpent incarne toujours un au-delà du représentable. Il signifie, pour Chaissac comme pour les artistes de CoBrA, bien davantage que la simple expérimentation formelle d’une décoration arbitraire : il exprime l’art comme concept existentiel, une sorte de formule incantatoire établissant un lien entre l’homme et la nature et permettant à des forces surnaturelles de circuler entre eux. »

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Chaissac & CoBrA, Sous le signe du serpent, sous la direction de Benoît Decron, préface Alfred Pacquement, textes Benno Tempel, Benoît Decron, Angelika Affentranger-Kirchrath, Anja Petz, Johannes Nathan, Victor Vanoosten, Gaëlle Rageot-Deshayes, Vanessa Noizet, Nadia Raison-Chaissac, directrice éditoriale des livres illustrés Nathalie Bailleux, édition Céline Guichard, Gallimard / Musée Soulages, 2021, 208 pages

Site Gallimard

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Catalogue officiel de l’exposition « Chaissac&CoBrA. Sous le signe du serpent », présentée au musée Soulages (Rodez) du 16 novembre au 8 mai 2022 – commissariat Angelika Affentranger-Kirchrath, Benoît Decron, Daniel Koep

Musée Soulages – Rodez

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