De la pensée juive, et bretonne, contre l’imperium, par Stéphane Zagdanski, écrivain

Galgacus, chef breton

« Pour un Juif tout est spirituel, y compris le matériel. »

En nos temps délétères, il est nécessaire de prendre un peu de hauteur.

Les séminaires de Stéphane Zagdanski intitulés La Gestion Génocidaire du Globe sont parfaits pour cela, dont viennent de paraître les séances deux et trois.

Trouer le Tout : le vide et le plein selon le Talmud (26 avril 2020) est une réflexion passionnantes sur les notions d’imperium (romain), à partir du fameux Digeste/Pandectes de l’empereur Justinien (533 de notre ère) et de la parole/Loi (juive).

D’un côté une volonté totalisante (tout recueillir pour tout régenter et soumettre à une unique pensée), de l’autre un questionnement infini.

D’un côté le refus du commentaire et la rationalité occidentale étroite, de l’autre son exaltation/jubilation et la flambée du sens moyen-orientale.

D’un côté le dogme, l’idéologie, la clôture, de l’autre l’ouverture.

D’un côté le pouvoir, de l’autre le désir.

Si l’on considère le Tout sans le trou qui au fond le constitue (pensée du Talmud), toute protestation ou agissement de bonne volonté sera automatiquement prisonnier du contraire dont il dépend.

Ainsi Lacan pouvait-il écrire scandaleusement, rappelle Stéphane Zagdanski, dans sa préface à la thèse d’Anika Lemaire : « Le refus de la ségrégation est naturellement au principe du camp de concentration. »

Issu de la Michna (compilation de commentaires oraux concernant la Torah datant de la destruction du Second Temple de Jérusalem en 70), le Talmud (Jérusalem/Babylone) est un vaste labyrinthe porteur d’un savoir ésotérique à la fois diffusé et crypté.

L’exégèse est inséparable de la pensée juive, particulièrement souple, labile, inventive.

« La Torah, dont procèdent la Michna et la Guemara [commentaires de la Michna], et plus généralement toute herméneutique juive et toute la Kabbale, la mystique juive, n’est pas conçue à l’origine comme un Texte élaboré à l’encre sur du parchemin, mais comme un Souffle fécondant des significations en perpétuelle vibration, cela en rapport avec la structure trilittère de l’hébreu, qui facilite la permutation des lettres et la circulation des voyelles au travers des consonnes, offrant de vocaliser les mots selon toutes les modulations envisageables… »

Nous provenons d’un alphabet mystique, d’une parole spirituelle, la Torah n’étant elle-même que l’haleine d’un Texte plus fondamental encore.

Les commentateurs juifs ne cesseront dès lors de « souffler sur cette braise inextinguible ».

« L’enroulement de la Torah, remarque superbement Stéphane Zagdanski, est en soi un signe de ce rapport innovant au Tout de la Loi, au sens où le Texte en se déroulant, dévoilant sa portion hebdomadaire, se réenroule ailleurs, préservant sa braise pour une lecture renouvelée. »

En un certain sens, le Talmud, telle est sa force immense, est ingérable.

Composé des myriades d’étincelles de sainteté issues des vases premiers brisés – de pure lumière – le déterminant, le monde demande réparation, le swing (sic) particulier de la pensée hélicoïdale juive offrant par sa pulsation géniale un accès privilégié à la source de toute chose.

Gober le Globe : les Romains, les Bretons, Heidegger et les Invisibles (séminaire du 10 mai 2020) prolonge la réflexion sur cette incommensurable – indigérable – pensée juive distinguant entre Règne (du cœur, de l’intelligence) et Domination, liée à la notion de Globe (circonscrit, fini) impliquant l’idée d’un rapport de force, relancé par la technolâtrie occidentale.

« Il est primordial, rappelle le webséminariste, de s’intéresser aux pensées et aux spiritualités non métaphysiques, pour comprendre à quel point le monde globalisé n’a rien de naturel ni de subtil, c’est une invention de brutes épaisses. »   

Dans son cours sur Parménide de l’hiver 1942-1943, Heidegger traite de la question de l’origine de la domination en Occident (la faisance, la puissance, le crime) et, bien entendu, de l’oubli de l’être, la mutation de l’alètheia en veritas actant le passage d’un régime de retrait/décèlement à un ordre d’aveuglement fondé sur la surenchère et le sans-repos – l’imperium menant à l’extermination.

Stéphane Zagdanski a retrouvé chez Tacite une parole extraordinaire du chef breton portant un nom latin Galgacus : « Nous, les plus nobles de toute la Bretagne, installés pour cette raison au plus profond de ses retraites, n’ayant sous les yeux aucun rivage asservi, nos regards mêmes n’étaient pas souillés par la contagion de l’esclavage. »

La véritable noblesse est liberté, Heidegger écrivant dans le traité historial Apports à la philosophie : De l’avenance (traduction de François Fédier) : « Seigneur est celui qui exerce une seigneurie sur la puissance. Se contenter d’acquiescer à la puissance tenue pour le fond même de la réalité, c’est là s’abaisser jusqu’à la pire servitude. »

Le philosophe allemand appelle les lantamonthès les Invisibles, ceux qui restent en retrait et règnent en toute clandestinité, n’ayant ainsi nul besoin de dominer.

« Si l’on a un tant soit peu d’oreille, conclut Stéphane Zagdanski, il devient dès lors légitime de se poser la question de savoir si les Juifs et le judaïsme ne seraient pas les véritables lanthamontès de la pensée de l’Etre. »

A suivre.

Stéphane Zagdanski, Trouer le Tout : le vide et le plein selon le Talmud, séminaire La Gestion Génocidaire du Globe 2, 2023, 66 pages

Stéphane Zagdanski, Gober le Globe : les Romains, les Bretons, Heidegger et les Invisibles, séminaire La Gestion Génocidaire du Globe, 3, 2023, 44 pages

http://parolesdesjours.free.fr/

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