L’oiseau porteur de feu, par Mathieu Lion, photographe

©Mathieu Lion

« On retrouve cette idée que finalement, l’origine de la civilisation n’est pas interne, que ce n’est pas une invention humaine ni un geste prométhéen, ou une création, mais un don qui a été reçu d’une extériorité représentée par ces oiseaux. » (Charles Stépanoff)

On appelle quelquefois en Normandie, explique Florent Richomme en 1842 dans un ouvrage d’enquêtes et de souvenirs, le roitelet, ou roitelet troglodyte, l’un des plus petits oiseaux d’Europe, rébet ou petit oiseau du bon Dieu.

Une légende, très largement oubliée par la population, raconte même qu’il serait porteur du feu, transmis par lui de Dieu aux hommes.

©Mathieu Lion

Cet oiseau est donc un messager, un signe favorable, un présage de vie s’épanouissant.

Dans un ouvrage plein de grâce, le photographe Mathieu Lion, ayant travaillé au cœur du Perche à l’occasion d’une résidence organisée par Le Champ des Impossibles (Christine Ollier), observe l’habitat de ce volatile fin et rare.

Tout dans ses images respire le calme, la présence discrète, la sacralité sans artifice du vivant.

« L’anthropologie et la paléontologie ont permis de décrire la relation feu-humain dans ses variations et sa complexité, et c’est notamment grâce à ces sciences que l’on comprend aujourd’hui l’intérêt de repeupler notre monde d’autres protagonistes non-humains. Afin de mieux comprendre ce qu’implique une autre idée de l’origine du feu, nous avons donc besoin d’autres imaginaires, des imaginaires étrangers. Il faut observer d’autres cosmologies que celle dans laquelle nous baignons pour, peut-être, mieux interpréter l’histoire de Roitelet. »

©Mathieu Lion

La mécanisation, les champs labourés impeccablement, le défrichage, c’est très bien, mais ne pas oublier que les oiseaux ont besoin de bocages, de forêts, de densité végétale.

Le roitelet indique à la fois notre besoin de progrès (le feu) et la fragilité de toutes choses.

Dialectique de la maîtrise et du sauvage.

On brûle des broussailles et autres débris.

On brûle de rage.

On brûle de ne pas brûler d’amour.

©Mathieu Lion

On ne brûle de ne pas parvenir à contempler roitelet, dont le chant est si ténu.

Le feu gagne les images de Mathieu Lion, comme un hommage au si mince oiseau.  

Retrouvons-nous pour la fête de la Saint-Jean, et célébrons de nouveau le mystère du don du feu.  

Screenshot

Mathieu Lion, Rencontre, extrait d’un ouvrage de Florent Richomme, textes/témoignages Annie Gachelin, Charles Stépanoff, Cédric Beaudouin, collection Les Carnets du Champ des Impossibles, coordination éditoriale Christine Ollier et Patrick Le Bescont, direction artistique Christine Ollier, Corinne App, Filigranes Editions, 2024, 78 pages

©Mathieu Lion

https://www.filigranes.com/livre/rencontre-mathieu-lion/

©Mathieu Lion

https://mathieulion.com/

https://www.lechampdesimpossibles.com/

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