Le don de la lumière, par Martin Bogren, photographe

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©Martin Bogren

Il est là, depuis quelques semaines sur la table de travail, puissant et tranquille, attendant d’être ouvert pour illuminer le jour.

Il me fallait quelques nuits d’insomnie, des rencontres folles, des égarements, beaucoup de travail, pour être à sa hauteur.

Italia, du photographe suédois Martin Bogren, est un livre qui donne envie de vivre, d’aimer, de voyager en ne craignant pas la solitude.

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©Martin Bogren

Un livre qui accroît la force existentielle, la joie, le sentiment de présence au monde.

Pourtant, nombre d’images ne sont pas nettes, accordant aux grains, à la pulsation chimique, une importance première, parce qu’ils disent l’éclatement des chairs et des visages dans la poussière du temps, et que toute persistance, d’une peau, d’une attitude, d’une forme à peu près solide, est de l’ordre d’un miracle, d’une grâce, d’une donation, d’une absolue gratuité.

Ici, au pays de Saint-Pierre de Rome, tout est sacré, parce que tout est protégé.

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©Martin Bogren

Parce qu’une femme en robe faisant son marché en portant un pauvre sac plastique est une sainte en puissance.

Parce que cet homme marchant sur l’avenue d’une grande ville est le fantôme de Samuel Beckett à Tanger.

Parce que les trains se souviennent de ce qu’ils doivent au charbon et à la souffrance des travailleurs des royaumes de l’ombre.

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©Martin Bogren

Parce que cet enfant coiffé à la brosse est un futur ragazzo faisant flamber les filles, et peut-être les voitures.

Alternant portraits et paysages, essentiellement urbains, Martin Bogren crée les conditions d’un cosmos désirable.

Sur papier épais permettant de traverser les tempêtes intimes, Italia est une Cythère, un trou dans le social mortifère, une beauté qui rédime.

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©Martin Bogren

Chaque être, chaque objet, chaque arbre est une apparition, entre évidence et mystère.

Le palais est drapé de soleil, et la passante du coin de la rue une gitane millénaire.

Tu t’endors sur un banc en pierre, tu contemples la nudité de ton amante dans une petite chambre d’hôtel, tu regardes un homme se tenant sur le toit d’un immeuble, prêt à devenir ange.

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©Martin Bogren

Embrasse-moi ma chérie sous le portrait de la Vierge, regarde comme le monde est beau dans les terrains vagues de la mélancolie.

Offre-moi tes yeux, ton dos, le pli de ta cuisse posée sur une chaise.

Il n’est nul besoin de chercher à mettre en scène les corps, la vie se charge pour eux de les disposer parfaitement dans l’espace.

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©Martin Bogren

Il y a des pages à écrire, des photos à prendre, des musiques à composer, des abris à bâtir, des mains à embrasser.

Il y a des bords de mer furieux, et des enfants maltraités, qui sont des rois secrets.

Carrelage froid, apprends-moi à t’aimer.

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©Martin Bogren

Pavé disjoint, apprends-moi à t’aimer.

Mon aimée, apprends-moi à t’aimer.

Italia ne se referme pas, il s’emporte dans le chaudron de l’inconscient, dans la salle de cinéma de nos rêves, dans un lit aux draps bientôt défaits, et tachés de plaisir.

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Martin Bogren, Italia, texte (suédois/anglais) de Martin Bogren, edited and designed by Greger Ulf Nilson, Bokförlaget Max Ström, 2016

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Max Ström – site

Martin Bogren est représenté par l’Agence VU’

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