Lettres du Caucase, par Philippe Herbet, photographe

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©Philippe Herbet

« C’est très doux de regarder la lune dériver dans le ciel de Grozny, de laisser la nostalgie s’insinuer dans les veines, d’entendre Ella Fitzgerald chanter All of You dans l’infini de ce moment. »

Le Caucase, territoire géographique aux paysages fascinants, est un lieu de multiples tensions, marqué notamment historiquement par la présence du poète, peintre, dramaturge et romancier russe Lermontov qui y fut envoyé par deux fois en exil par le pouvoir tsariste.

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©Philippe Herbet

Mort à vingt-six ans en 1841 lors d’un duel près de la ville d’eau de Piatigorsk, son décès ne fut alors pas plus considéré que celle d’un chien par ses détracteurs, courtisans du régime, qu’il accusait d’avoir causé la disparition tragique du génial Pouchkine.

Cette région de l’Eurasie est un lieu de prédilection pour le photographe Philippe Herbet, qui peut y reconnaître ses préoccupations romantiques, son goût des espaces grandioses et son intérêt pour les zones frontières. 

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©Philippe Herbet

Dédiant à Lermontov son livre Lettres du Caucase (Yellow Now, 2013), l’auteur de Les Filles de Tourgueniev (Bessard Editions, 2017) ne cesse ainsi de méditer cet espace situé entre Mer noire et Mer Caspienne correspondant parfaitement à son idiosyncrasie.

Connaissez-vous bien la république de Kabardino-Balkarie ? et l’Ingouchie ? et le Daguestan ? et l’Ossétie du Nord ? et la république d’Adyguée ? et l’Abkhazie ?

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©Philippe Herbet

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©Philippe Herbet

Vous êtes las des anciens parapets ? Pas de problème, Philippe Herbet vous emmène, en images et textes, dans un ailleurs de montagnes et de plaines qui pourrait bien vous faire reconsidérer votre sensation d’épuisement de la géographie.

L’atlas est l’œuvre d’un mosaïste, dont le train révèle la géométrie précise.

Enlèvements, islamisme radical, militarisation, conflits armés liés aux hydrocarbures, attentats, le Caucase si beau peut vite se transformer en enfer.

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©Philippe Herbet

Y fuyant un chagrin d’amour, Philippe Herbet y rencontre des femmes superbes et fières, proches et lointaines, fantomales et de chair.

Vodka, filles en minijupe, chants ivres, embrassades, pas de doute, on est dans le Caucase.

« L’amour à la russe, à la cosaque, sur un air tzigane. Nous nous rencontrons le premier mai, écrit Philippe Herbet, le jour du muguet sur ces monts au-dessus de Domnay, parmi les skieurs. Tout le monde est à la fête, un peu gris. Regards. Galina m’aborde avec un soupçon de provocation, nous brisons la glace dans le téléphérique, et nous prenons un verre en bas. Nous nous quittons après un baiser chaste et plus qu’amical. Le deuxième jour, nous échangeons des confidences et nous faisons l’amour dans la chambre d’un sanatorium de Teberda. Le troisième, on se dit ‘je t’aime’. Le quatrième on se quitte avec des promesses. »

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©Philippe Herbet

La vie aventureuse n’est-elle pas merveilleuse quelquefois ?

Grozny apparaît, reconstruite, flambant neuf, prête à reflamber.

La carte défile, aussi les hommes en armes, les personnages à la Limonov, et les vrais-faux dévots.

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©Philippe Herbet

On entend beaucoup de choses, on est ballotté au gré des conversations, mieux vaut laisser agir sa boussole intérieure, et, comme le photographe, regarder le théâtre de la vie où qu’il soit, les belles en talons hauts, et la rude simplicité de la vie rurale en des hauteurs très souvent enneigées.

Points de vue, restes de fortins, signes de la laideur moderne, nuages bas, treillis.

Il fait froid, mais les bouleaux ne tremblent pas.

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©Philippe Herbet

Staline, es-tu là ?

« Pour les ‘méritants’, c’étaient les années douces, l’Abkhazie, le paradis terrestre. Il ne reste désormais que les ruines dans lesquelles errent des touristes russes désargentés. Quelque chose de tragique flotte dans cet air tropical. »

Il faut prendre de la hauteur, quitter l’Histoire, ses illusions et ses crimes, respirer intensément là où la salissure n’est pas encore arrivée.

Tout voyage au long cours est une expérience intérieure.

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©Philippe Herbet

Il y a la solitude bien sûr, mais aussi les rencontres capitales, ainsi celle de Flush, le chien.

« Il a le poils ras, brun comme un cachou, il est maigre, musclé, léger, alerte, sautillant, il gambade joyeusement avec beaucoup de classe. Il se méfie des vaches. Je l’avais rencontré à la frontière avec l’Ossétie du Nord dans les gorges du Darial, il y a trois jours. Depuis, il m’accompagne dans toutes mes balades, du côté du Kazbek, dans la vallé de Sno où nous sommes allés jusqu’à Karkoucha, vers Gudauri. Je me demande où il dort, mais je le retrouve en forme chaque matin, prêt à marcher des heures dans la neige, dans l’air glacial. Je l’ai appelé Flush. »

Le Caucase de Philippe Herbet est le rêve d’un exil hautement désirable.

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Philippe Herbet, Lettres du Caucase, textes Philippe Herbet, conception et maquette Philippe Herbet, Emmanuel d’Autreppe, Delphine Vanseveren, Yellow, Côté photo, 2013, 152 pages

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©Philippe Herbet

Philippe Herbet – site

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©Philippe Herbet

Editions Yellow Now

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