Oracle, électricité mentale, par Thibault Tourmente, artiste iconographe

©Thibault Tourmente

Il faut être entièrement disponible lorsque l’on découvre un fanzine de Thibault Tourmente.

Créer en soi un espace de silence, afin de se laisser avertir, informer, percuter, troubler.

Comme si notre cerveau était un atlas, ou un stock illimité d’images dont nous ne nous savions pas les dépositaires.

©Thibault Tourmente

Sur feuille libre, à l’orée de sa nouvelle publication autoéditée intitulée Oracle, un paragraphe est donné à lire, c’est un préambule, une antichambre, une mise en condition avant une méditation tantrique : « Nous signalons au nouveau lecteur que toutes les citations figurant dans la revue, qu’elles soient d’origine religieuse, philosophique ou scientifique, sont utilisées seulement quand leur contenu correspond à des vérités qui ont transparu sans cesse au cours de l’histoire humaine, et que leur objet est métaphysique : c’est-à-dire traitant de la connaissance de soi, des rapports de l’Individuel et de l’Universel. »

Nous voici prévenus, il ne s’agira pas ici de s’abîmer dans l’anecdotique, mais d’explorer la profondeur des rapports dialogiques liant le Moi et le Soi.

Oracle est un système racinaire, une poussée de vérité entre le sol et les nuées psychiques imprimée sur papier gris sans gloire, mais dont la trame indique les prémisses d’une disparition probablement proche de toute figure.

©Thibault Tourmente

Les visages ont déjà été engloutis par les drames des temps, nous sommes dans les parages de l’iconoclastie et du protestantisme strict.

On ne comprend pas toujours bien ce que l’on voit, tant mieux, il faut deviner la douceur de la peau sous les bas tendus et le froissement des imperméables se heurtant dans la nuit.

Il y a des formes archétypiques, des cercles noirs, des ovules bizarres, des radiographies de l’improbable.

©Thibault Tourmente

Louis Aragon écrirait « vague de rêves » devant ces chevelures d’explosion et ces griffures de ténèbres.

Christ pantocrator a bien vieilli, qui ressemble à son Père, sa mandorle est désormais la cible mouvante des snipers d’élite de l’idéologie sacrificielle.

Il nous faut trouver des chemins inédits, d’autres géographies, des significations neuves.

La rencontre d’une épaule nue et d’un œil sans iris sur la table de dissection de l’Histoire invite à de nouveaux fantasmes.

Mais ne voyez plus, vous voyez trop, écoutez, entendez le bruit sourd des cornes des boucs en colère, nos frères, se chargeant à mort une ultime fois.

©Thibault Tourmente

Chez Thibault Tourmente, ça prestidigie, ça nombre d’or, ça fractale et ça épouvante dans le sang.

On pense aux quinze numéros de la revue Documents (1929-1931) de Georges Henri Rivière, Georges Bataille et Carl Einstein, à ce qui écartèle, troue, stupéfie et invente dans la déchirure de l’image des significations imprévues.

Contre la fascisation et la réification des liens, les pieds nus, la délicatesse au cou de faon, la danse burlesque des primitifs de toujours.

Thibaut Tourmente produit des images somnambules où Albert Renger-Patzsch discute avec Bertolt Brecht sur les derniers soubresauts de la civilisation bourgeoise, ce champ de ruines.

©Thibault Tourmente

Il faut tout reprendre à zéro, du caillou, de la toison féminine, du cadavre des peuples martyrisés, et construire des ponts, des arches d’alliance, des brouillons et des sentes de griffures.

Nous sommes dans le labyrinthe.  

Thibault Tourmente, Oracle, couverture et mise en forme du texte Guillaume Guilpart, autoédition, 2022

https://www.instagram.com/thibault_tourmente_/?hl=fr

©Thibault Tourmente

Fanzine présenté lors de Rolling Paper #4, au BAL (Paris), du 23 au 25 septembre 2022 – signature prévue le dimanche 25 septembre à 16h

https://www.le-bal.fr/2022/06/rolling-paper-4

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