Au borinage, dans le bleu et les cartes, par Anne-Sophie Costenoble, photographe, et Fidéline Dujeu, écrivain

le

©Anne-Sophie Costenoble

« toutes ces histoires écrites sous sa peau / elle n’a rien demandé à personne / elle veut une vie simple / un jardin de fleurs sauvages / des enfants sur une balançoire / un amour » (Fidéline Dujeu)

Se présentant sous emboîtage noir et blanc très élégant, Et tout ce bleu où s’égarer est une proposition poétique d’Anne-Sophie Costenoble et Fidéline Dujeu sur le territoire du Borinage, région de Wallonie marquée par l’exploitation industrielle du charbon.

Depuis la fermeture des dernières mines, le Pays Noir est devenu vert, et même bleu.

©Anne-Sophie Costenoble

On se souvient peut-être du terrible documentaire de Joris Ivens et Henri Storck datant de 1934 sur la misère sociale en ces lieux de grande immigration, notamment italienne, et d’exploitation de l’homme par l’homme.

Si la grande pauvreté n’a pas totalement disparu, l’espace s’est ouvert, les gueules noires ont muté.

Et tout ce bleu où s’égarer est composé de vingt-cinq cartes postales d’Anne-Sophie Costenoble et d’un long texte imprimé sous forme de leporello vertical de Fidéline Dujeu.

©Anne-Sophie Costenoble

©Anne-Sophie Costenoble

Loin d’un apitoiement sur l’enfer du prolétariat minier, ce livre d’artiste est comme toujours chez la photographe belge un éloge de la délicatesse, des intensités subtiles et du noyau d’énigme en chaque être.

Réalisées au sténopé numérique, ses images, en noir et blanc et couleurs, témoignent avec beaucoup de tendresse, et parfois avec une douce drôlerie, de la force de vie en ce territoire populaire.

Un chien semble faire un clin d’œil, les personnages tiennent avec affection contre leur ventre ou leur poitrine un pigeon, un simple bouquet de fleurs, un mouchoir, une sorte de Mogwai.

©Anne-Sophie Costenoble

L’impression générale est celle d’un temps suspendu et d’un ailleurs créé par les vibrations de lumière autour des sujets représentés.

Le regard n’est pas sociologique mais poétique, cherchant en chacun un ordre de noblesse.

Le ballet des mains est observé avec acuité, qui s’ouvrent ou s’agrippent.

©Anne-Sophie Costenoble

La nature est omniprésente, artificielle ou non : le jardin où se repose un apiculteur, un papillon sur un rideau, un impressionnant tatouage de lion sur une épaule ample, des arbres sur une dentelle de peu de prix, des chevreuils, un perroquet.

Mais chez Anne-Sophie Costenoble, la beauté provient d’abord d’une sensation de la dimension sacrée de l’existence.

Il y a des signes de religion, un petit garçon portant des ailes d’ange, une figure de sainte, une installation mariale en stuc coloré.

©Anne-Sophie Costenoble

Dans la ruine des infrastructures minières réhabilitées, non loin de la statue d’un soldat de la Première Guerre mondiale, il y a la réinvention, modeste et quotidienne, des destins, le secret d’un présent toujours vécu comme une merveille indéchiffrable.    

Fidéline Dujeu écrit joliment : « des chemins de mûres et de ronciers / l’ont menée dans un jardin oublié / une madone s’est penchée »

Anne-Sophie Costenoble & Fidéline Dujeu, Et tout ce bleu où s’égarer, Pyramides Noires Editions, 2023 – 50 exemplaires

©Anne-Sophie Costenoble

https://www.ascostenoble.be

/https://www.ascostenoble.be/publications

©Anne-Sophie Costenoble

https://www.brunorobbe.com/

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s