
« Les critiques français de mon œuvre ont toujours cru que j’avais un MESSAGE INTELLECTUEL à porter. Alors que c’est la vie qui m’intéressait. »
A la façon d’un « Qui je suis ? », le poète, écrivain et peintre mauricien Malcolm de Chazal (1902-1981) évoque dans un texte inédit essentiel son chemin spirituel.
Intitulé Demi-confidences, cet ensemble de vingt-sept fragments courts est une leçon de vie offerte à l’intelligence des lecteurs les plus solitaires, les plus vrais, les plus désarrimés, les plus conscients des secrets du langage.
Il y a indéniablement une dimension ésotérique dans l’œuvre de l’auteur de Sens-plastique (Gallimard, 1947) et de L’Evangile de l’eau (1952), que Jean Paulhan trouva géniale.
Ayant eu un ancêtre rosicrucien disciple du comte de Saint Germain, Malcom de Chazal fonde son écriture sur l’enthousiasme et le sens de la rupture, se situant du côté des mystères et révélations de la Fraternité blanche (lire Helena Blavatsky).
Mais il s’agit d’abord d’accomplir son destin, de perdre les malices de l’intelligence pour se retrouver simple d’esprit, enfant, innocent.
« Si l’arbre pensait à l’avenir, il ne pousserait pas. »
Il n’y a pas de hasard, nous sommes choisis, destinés, nous avons à découvrir ce pour quoi nous sommes nés.
Les événements, les rencontres, précise-t-il, nous aident à nous élever, à nous accomplir.
Parfois considéré comme « un monstre » ou « un pestiféré », Malcom de Chazal n’a pas masqué son sentiment d’être fondamentalement étranger à cette terre où il vécut, l’Île Maurice, affirmant une identité plus lointaine ou intérieure que le seul espace qui le portait, cherchant davantage une « île spirituelle » qu’un espace géophysique circonscrit.
« L’Île Maurice courante ne m’intéresse guère, sauf par les rapports de spiritualité. La Réelle Île Maurice est celle qui sortit de moi. Alors, le patriotisme de la Terre ? Je ne le connais pas. Je suis Mauricien légalement, Et c’est tout. Parler du Mauricien qui a écrit Sens Unique [1974] est un non-sens. »
A propos de la mort : « La mort, c’est très simple. Poussez à fond l’absence et l’on y est. Car au fond, la mort est un DETACHEMENT. Où le double [du « je est un autre »] est de plus en plus assumé, jusqu’à ce qu’il soit tout. Vie et mort se rejoignent, j’ai toujours su cela. On a séparé la mort de la vie et la vie de la mort. On a eu donc à affabuler la vie et à affabuler la mort. On ne connaît l’une que par l’autre et vice versa. Que l’Homme lie le conscient et l’inconscient et qu’il cesse de vivre aux deux bouts de lui-même et qu’il participe à la TOTALITE. »
Et puis ceci, qui me semble d’une grande lucidité : « Les autres existent. Seul le poète vit. Je parle de celui qui est comme l’enfant. »
L’enfant qui a le cri, comme l’oiseau, comme le soleil, comme Giotto, comme Dieu.

Malcolm de Chazal, Demi-confidences, ouvrage présenté par Hélène Baligadoo et Emmanuel Richon, Editions Allia, 2024, 80 pages