
©Persephone Michou
C’est un merveilleux petit ouvrage relevant du livre d’artiste.
Des photographies, déchirées ou non, insérées à la main dans le corps de l’œuvre, des cyanotypes, des images issues des albums familiaux.
Avec If I forget you, I will love you again, Persephone Michou rend hommage à ses parents en leur offrant une barque d’éternité bleue et mauve.
Chronos nous avale, la photographe arrête pour quelques instants – des années ? des siècles ? – le temps, les corps et visages de nos proches sont préservés.
On se perd de vue, on disparaît, mais l’on survit, au moins un peu.

©Persephone Michou
Munie de son appareil Polaroïd, Persephone Michou est allée sur les lieux où avaient été prises les photos de ses parents, marchant sur leurs pas, de leur ville natale – Preveza en Grèce – à leur quartier d’Athènes.
L’artiste ne recherche pas la belle image, mais la persistance de formes, défiant l’oubli tout en soulignant sa force d’effacement.
Les photographies ne sont pas forcément nettes, elles contiennent des accidents, rien n’est stable, fors l’amour qui embrasse la totalité d’un parcours.

©Persephone Michou
On ne saura rien de précis sur l’histoire singulière des parents, quand importe surtout le geste de poésie qui les célèbre en traversant peines et joies.
Un tel livre peut être considéré comme un acte inaugural.
Il faut d’abord remercier les siens, avant de, peut-être, larguer les amarres.
Dans la mythologie grecque, Léthé, fleuve des royaumes souterrains, est décrit comme coulant paisiblement : on va y boire pour ne souffrir du passé.

©Persephone Michou
En son cours silencieux, If I forget you, I will love you again possède une grande douceur, une attention à la grâce d’exister, un ordre de bonheur qui est celui d’un couple se tenant droit dans la vie, et surtout ensemble.
Chacun repensera probablement à ses proches, à leur destin, à tout ce que nous n’avons pas osé dire, ou mal dit, ou trop dit.

©Persephone Michou
Ce livre n’est pas un tombeau ou un mémorial, c’est un hymne, un chant discret, dont la matière très belle se confond avec l’onde profonde où se noient les visages.
J’imagine l’artiste au moment de la composition de cet opus très émouvant, j’y vois de la fidélité, du déplacement, un acte d’amour jusque dans la déchirure.

Persephone Michou, If I forget you, I will love you again, editing and design by Persephone Michou and Yorgos Yatromanolakis, Zoetrophe Athens, 2023, 88 pages – 99 exemplaires numérotés
https://www.zoetropeathens.net/
https://www.persephonemichou.com/
Persephone Michou sera présente à Polycopies (Paris), Bateau Concorde-Atlantique – Berges de Seine, Port de Solferino – du 8 au 11 novembre 2024