Les deux Beune, jouissance de phrases, par Pierre Michon, écrivain

Les sources de la Loue, 1864, Gustave Courbet « Quant à la vérité, je crois que personne ne voulait la savoir. » Quel plaisir de relire d’une seule traite, un jour de grève, La Grande Beune de Pierre Michon, livre paru chez Verdier en 1996, accompagné aujourd’hui d’un inédit de même taille, La Petite Beune, les deux…

Moi, infant d’Espagne, par Serge Airoldi, écrivain

Vue sur la baie, 1921, Juan Gris « Songes-tu parfois aux cris d’un combat, à ces hurlements terrifiants, ces bandits barbares qui demeurent dans la pire des mémoires, ce déchirement ultime avant l’autre empire ? Songes-tu à un visage, à un effroi particulier ? L’éclair de glace qui passe dans un regard et ton glaive qui tue. Ta…

Ecrire au bruit des tarabouks, par Gustave Flaubert, écrivain, épistolier

« Si tu veux savoir l’état de nos boules, nous sommes couleur de pipe culottée. Nous engraissons, la barbe nous pousse. » Philippe Sollers a souvent recommandé de commencer la journée, non seulement par la lecture du journal (leçon de Hegel), mais par celle de quelques lettres de la correspondance de Voltaire, ou de Louis-Ferdinand Céline. Voltaire…

Jusque dans les pores des choses, par Sylvia Ney, photographe

©Sylvia Ney « Pas si rêveur encore que l’on pense, je sais voir et voir comme voient les myopes jusque dans les pores des choses, parce qu’ils se fourrent le nez dessus. » (Lettre de Flaubert à Louise Colet, Croisset, 16 janvier 1852) De l’autre côté de l’eau, livre merveilleux de Sylvia Ney, relève-t-il du genre –…

Flaubert en ses lieux, par Stéphanie Dord-Crouslé, chercheuse

« […] j’ai au fond de l’âme le brouillard du Nord que j’ai respiré à ma naissance. Je porte en moi la mélancolie des races barbares, avec ses instincts de migrations et ses dégoûts innés de la vie qui leur faisait quitter leur pays comme pour se quitter eux-mêmes. » (Flaubert, lettre à Louise Colet, 13 août…

Mon chéri, Gustave Flaubert et Guy de Maupassant, une correspondance

Il me plaît beaucoup de lire sous la plume de Gustave Flaubert l’expression « mon chéri » adressée à Guy de Maupassant, qui, venant de publier Boule de suif, a provoqué chez son illustre mentor, père spirituel, un sentiment de profonde admiration. Tous deux se sont écrit pendant sept ans, de 1873 à la mort de l’auteur…

Flaubert et Du Camp en Egypte, par Sylvain Venayre, historien

Maxime Du Camp « Le bazar des esclaves, écrit du Caire le 2 décembre 1849 Gustave Flaubert à sa mère Caroline, a eu nos premières visites. Il faut voir là le mépris qu’on a pour la chair humaine. Le socialisme n’est pas prêt de régner en Egypte. » J’aime beaucoup la collection de poche intitulée Format Passeport…

Une histoire vagabonde de la littérature romanesque, par Philippe Le Guillou, écrivain

Essai de critique subjective sur l’art du roman à travers les siècles, écrit par un lecteur assumant totalement ses goûts parfois hétérodoxes, Le roman inépuisable, de Philippe Le Guillou, est un éloge de la littérature comme capacité d’émerveillement. Entrée particulièrement enthousiasmante dans un domaine romanesque marqué par sa liberté et sa puissance protéiforme, cet ouvrage…

Lettre à Samuel Beckett, par Yannick Haenel, écrivain

J’ai reçu de Yannick Haenel copie d’une lettre écrite pendant le confinement pour Samuel Beckett, texte lu un soir pour la radio-télévision belge. Il est inédit en français. Je vous le transmets, sans commentaire, comme on se passe le feu en silence, alors que gagnent les ténèbres. « Montreuil, le 1er mai 2020 Cher Samuel Beckett,…

De la fraternité, Albert Camus et Louis Guilloux, une correspondance

« Ce qui équilibre l’absurde, c’est la communauté des hommes en lutte contre lui. Et si nous choisissons de servir cette communauté, nous choisissons le dialogue jusqu’à l’absurde – contre toute politique du mensonge ou du silence. » (Albert Camus à Louis Guilloux – 5 janvier 1946) Dans l’atmosphère de meurtre et de petitesse morale…