
Rebel Riders est, comme souvent chez Dienacht Publishing (Leipzig, Allemagne), un livre inattendu.
Son auteur est un photographe indonésien, Muhammad Fadli, dont il s’agit du premier ouvrage, consacré à la communauté des bikers de vespas trafiquées très présentes dans son pays.
Excellemment édité, Rebel Riders offre à ses lecteurs, outre des photographies d’engins motorisés et une tête de mort en quatrième de couverture, une pochette plastifiée comprenant dix stickers à coller sur la carlingue de votre bécane préférée (Java Rosok Extreme, Scooterist Extreme, Scooterist Independent…), et un index sous forme de papier journal de format A3 plié donnant les légendes des images du livre.

Cette disparité de matières et cette approche multipolaire d’un même sujet procurent un beau frisson de jubilation, celui des sales gosses bricolant dans leur garage une fusée spatiale et croyant vraiment à sa mise en orbite.
En Indonésie, les petites guêpes italiennes (Vespas) sont particulièrement appréciées, mais le génie du peuple en a fait bien d’autres choses, les transformant en véhicules improbables, drôles ou dignes de Mad Max.
Ce sont des divinités motorisées parcourant en tous sens le pays, des monstres d’acier à la limite de l’effondrement, des objets chamaniques et sauvages. On les appelle ici des « Vespas extreme » ou « Extreme Vespas »

Il y en a des milliers produisant un boucan de tous les diables, telle une armada de frelons asiatiques surgis des entrailles de la terre.
On peut les détester, les adorer, mais il est impossible de ne pas s’arrêter pour les regarder longuement.
Ce sont des jouets servant à se déplacer en famille, entre copains, ou même à faire la guerre.
Ils sont de fierté et de rire, un symbole d’indépendance d’esprit et de liberté de déplacement.

En lunettes de soleil noires ou cheveux longs, leurs conducteurs sont les agents d’une fureur de vivre considérable.
On peut les diriger avec nonchalance, cigarette posée derrière l’oreille, mais attention il se pourrait bien que le calme apparent des bikers ne réserve des tempêtes insoupçonnées.
Ne vous moquez pas d’eux, vous seriez aussitôt métamorphosé en chenille.
Règnent en ces inventions d’objets non identifiés l’esprit du kart et de la culture underground.

Lancée contre la normopathie sociale, la Vespa Extreme est le ciment d’une communauté bien décidée à ne pas laisser abuser par les standards de la société de consommation.
Le pouvoir appartient au peuple, aux jeunes filles à la peau maculée de taches de boue, aux jeans troués et aux beaux scooters hétérodoxes.
Voilà, vous venez de coller un sticker sur la carcasse de votre ordinateur portable. Vous êtes un peu de la famille maintenant.
En attendant de remonter à l’envers la mobylette de votre enfance.
Muhammad Fadli, Rebel Riders, Dienacht Publishing, 2018, 128 pages – book desing, Calin Kruse

Délicieuse présentation de ces irrespectueux vespasiens !! 🙂
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superbe!
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