Archipel, une rétrospective photographique de Serge Clément

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© Serge Clément

Il faut rendre grâce aux éditions Loco de nous faire découvrir l’œuvre importante du photographe québécois Serge Clément, très méconnu en France.

Reprenant un ensemble d’images produites ces vingt dernières années, l’ouvrage Archipel est en quelque sorte une rétrospective construite à partir de portfolios extraits de six livres publiés entre 2000 et 2015 – choisis parmi une trentaine (liste incluse à la fin).

Les voici regroupés en trois archipels, Fragrant Light (2000) et Sutures (2003), courants – contre-courants (2007) et N à Y (2011), Dépaysés (2014) et Chassés-croisés (2015).

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© Serge Clément

Au fur et à mesure de ses années de recherche sur le visible et le non-perçu, explique Zoé Tousignant dans sa préface, le livre est devenu pour Serge Clément, par ailleurs grand collectionneur d’ouvrages photographiques venus du monde entier, un espace aussi important que celui de l’exposition.

Sa méthode de travail et ses ambitions esthétiques pourraient se résumer ainsi : accumuler de la matière, ne pas développer immédiatement, faire du temps un tamis, prendre de la distance, ne pas laisser l’émotion en seul maître de la sélection, ne pas craindre l’opaque et le mystère, questionner l’image en tant que telle et la photographie comme médium, aborder la ville comme territoire de fictions muettes.

Archipel n’est pas un mausolée, mais un livre de brassages, de recompositions et d’ouvertures.

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© Serge Clément

Les images formant le fil d’une existence ne sont pas fixes, mais, en tant que corps vivants, soumises à des mutations permanentes.

Publié sous format italien, Archipel peut être pivoté pour être placé à la verticale, comme un calepin, un carnet de notes.

Serge Clément aime les effets de matières, de découpes dans l’espace, de coulures, et le trouble visuel induit par des vitres brisées, rayées ou tachées.

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© Serge Clément

La ville est pour lui un labyrinthe obscur et énigmatique, un emboîtement de constructions à la façon de l’école russe, une peinture de pierre et de fer.

L’être humain n’y est que silhouette, pluie d’atomes, vague graffiti. C’est une absence, une ombre, un pur passant, un froissement de ciel.

A Hong Kong (livre Flagrant Light), Serge Clément rencontre des lumières, des écritures millénaires, des signes attirant tout l’espace.

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© Serge Clément

A Berlin (Sutures), il est attentif à des visages de papier, des affiches déchirées et des échelles ne menant nulle part. Cette ville a beaucoup souffert, et c’est un regard ne cessant de vous poursuivre.

Qu’il soit en Europe ou en Amérique du Nord (courants – contre-courants), Serge Clément questionne notre capacité à voir, lire, déchiffrer un environnement à bien des égards saturé de messages secrets.

New York (N à Y) est pour lui la découverte du potentiel esthétique du numérique, de la couleur, et de la dimension sensuelle des fantômes y résidant.

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© Serge Clément

 

Dépaysé publié chez Kehrer Verlag revisite avec radicalité quarante d’archives en noir & blanc. Le silence s’impose, il est métaphysique.

Enfin, Chassé-Croisé signe le passage quasi définitif de Serge Clément au numérique, et à une forme d’acceptation d’une sensualité sans effroi.

Prolongeant ses thèmes de prédilection, le photographe arpenteur semble avec ce livre accéder à une dimension de liberté nouvelle, un accueil plein du visage des choses, sans filtre.

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Serge Clément, Archipel, texte Zoé Tousignant, éditions Loco, 2019, 192 pages

Editions Loco

Serge Clément

Serge Clément est représenté à Lyon par la galerie Le Réverbère

 

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