
Il y a entre Warhol et Basquiat, ces deux génies de la pop-culture américaine de la deuxième grosse moitié du XXe siècle, un jeu de fascination réciproque, qui ne permet pas de savoir qui est le plus admiratif des deux.
Tous deux sont des hommes de l’image, conscients que le spectacle est un monstre dévorant ses enfants, et qu’il faut être fin stratège pour en espérer être quelque peu le maître, du moins plus qu’un quart d’heure comme le prophétisait le chaman blanc de la Factory.
Voici le gamin et le grand manitou s’échangeant leur pouvoir.

Voici une transsubstantiation catholique et vaudou.
Voici deux guerriers de la traversée des apparences réunis par Michael Dayton Hermann dans un beau volume à la couverture jaune et rouge publié par Taschen.
Entre 1982 et 1987, ces deux-là se sont fréquentés, se sont charmés.

Andy Warhol, qui avait l’habitude de documenter obsessionnellement sa vie, a fait rentrer son ami dans la geste de son Diary, le transformant en œuvre de l’esprit à mesure qu’il le voyait.
Des centaines de photographies en noir & blanc sont ici reproduites, mais aussi des œuvres réalisées à quatre mains.
En 1982, Basquiat porte une impressionnante chevelure afro, qu’il s’amuse, l’associant au portrait d’un Warhol dubitatif, à faire exploser sur la toile.

Soleil noir et doutes blancs. Enfance et science. Savoir et non-savoir.
Apparaît en Polaroid le visage de Paige Powell, ex petite amie d’un jeune artiste se détruisant à la cocaïne.
Apparaît un petit-fils adoptif faisant des exercices sportifs, offrant son corps à l’objectif impudique – gros plan sur le slip blanc moulant – de son grand-père indocile.

Rues de New York City, graffitis, toiles d’exorciste.
L’enfant sourit, il a toutes les grâces, tous les dons, et désormais toutes les chances.
Des soirées, des filles superbes, la décontraction souveraine d’un exilé intérieur.
Warhol on Basquiat offre des clichés de la vie quotidienne d’un des géants de l’art du XXe siècle, des reproductions d’œuvres parfois peu vues, du désir, des gestes cool.

Tenue blanche légère pour un vernissage, repas, drague.
Nul doute, le poseur dandy est très doué, pour qui le vrai sujet de l’art est la confrontation d’avec la mort, d’avec les puissances de dépossession, d’avec l’Histoire en son manteau de crimes.
Keith Haring est là, mais aussi Rosanna Arquette, Michael Jackson, et tant d’autres comètes désirables.
On se souvient peut-être d’un des derniers tableaux de Jean-Michel Basquiat, Riding with Death (1988), représentant un personnage de couleur noire chevauchant un squelette.
On y découvre l’envers de la fête permanente qu’a photographié Warhol, un artiste de 28 ans sachant qu’il va mourir très vite.
Warhol on Basquiat, sous la direction de Michael Dayton Hermann, Taschen, 2019, 314 pages
Comme il me fait envie celui- là ! Mais mes deniers je les garde pour mes vacances dans quelques jours ! Terrible ! En tout cas, merci pour ce partage !
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