Interrègne, fin de partie, par Ronny Ronning, photographe

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©Ronny Ronning

Nous vivons une époque sans cap, nous sommes perdus, les burn-out prolifèrent, les enfants ne parviennent plus à se projeter, nous sommes la honte des espèces animales.

J’ai surpris mon chat à comprendre parfaitement l’une de mes conversations, mais il s’est détourné lorsque, stupéfait, je lui en ai fait la remarque : quel intérêt de communiquer avec un humain ?

Faut-il parler de décadence, de fin des civilisations, de servitude psychique terminale, ou, comme le photographe Ronny Ronning d’Interrègne, titre de son nouveau livre aux éditions Journal ?

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©Ronny Ronning

Utilisant une caméra analogique, une pellicule noir & blanc et un flash, exposant, au cours du développement, son film à la lumière, l’artiste suédois est parvenu à créer des images semblant se situer dans quelques limbes de l’imaginaire, donnant à chaque forme une sorte de matière à la fois fantomatique et surprésente, comme chez l’exploratrice Sandrine Elberg.

Parce que tout disparaît, qu’il ne nous restera bientôt plus que des souvenirs du monde qui nous a vu naître et que nous sommes des exterminateurs.

La planète est en feu, et les discours moraux des armes de guerre au service des manipulateurs comme des peine-à-jouir.

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©Ronny Ronning

Mais que voit-on dans les yeux de Ronny Ronning ?

Des lignes graphiques, des structures végétales, la nature en sa puissance malgré tout.

Des pierres de Terre comme sur une planète inhabitable.

Des souches d’arbres, des bâtiments abandonnés, des drôles de lumières post-atomiques.

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©Ronny Ronning

Des roseaux, des machines orphelines, des surfaces abîmées dans un monde altéré.

Des grillages, des points astraux, des comètes erratiques.

Des mers de luminescence, des villes perçues du ciel comme des continents à la dérive.

Des immeubles vides, des sous-sols, des brouillards de particules méphitiques.

Des ronces.

Un cygne noir de pollution.

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©Ronny Ronning

Des impressions tarkovskiennes.

Une force de catastrophe persistante.

Les réunions concertantes, débats et livres concernant l’éthique de la fragilité se multiplient, mais au fond la férocité fait loi.

L’humain a disparu, autant ne pas se raconter d’histoire.

Il nous reste, si nous avons cette chance, les visages de nos proches à aimer, les corps à désirer, l’instant à habiter.

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Ronny Ronning, Interregnum, layout and design Ronny Ronning, editor Gösta Flemming, Journal Photobooks (Sweden), 2021 – 200 exemplaires

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©Ronny Ronning

Se procurer Interregnum

 

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