
« I don’t need your permission to exist. » (Javi)
Le néo-zélandais Robin Hammond est un photographe puissant, dont le thème majeur est celui de la dignité humaine et du droit fondamental à la différence.
Après le percutant My Lagos (dont la jaquette est l’affiche pliée d’un film de Nollywood) paru en 2016, les éditions Bessard publient Where love is illegal, ensemble de quatre-vingts portraits Polaroïd grand format de personnes LGBTQI+.
Accompagné de témoignages manuscrits des personnes représentées venant du monde entier, ainsi que des extraits d’interviewes effectuées par l’auteur lui-même, cet ouvrage est un acte essentiel accompli pour la défense de la tolérance sexuelle.

Pour éviter de subir chez eux la violence des persécutions homophobes, lesbiophobes ou transphobes, bon nombre des personnes ayant accepté de poser cachent leur visage.
Ce geste de protection en dit long sur la violence subie au quotidien dans certains pays lorsque l’on cherche simplement à être soi-même et à aimer qui l’on veut.

Walid : « I want to hold his hand in public or kiss him but that’s a crime here. We want to spend our life together and we will do it despite of everything. »
Nillam Poudel : « They have hurt my spirit but they have not broken me. »
Where love is illegal est un livre d’une grande force politique, porté par une conscience des enjeux formels de la photographie.

Pas de misérabilisme ou de pathos, mais la grâce des corps, quels qu’ils soient, de peau noire, de peau blanche, torse nu ou non.
Les yeux sont tendus, fatigués, les bouches closes.
Devant l’objectif de Robin Hammond, chacun a le droit d’être vrai, et respecté dans son intégralité physique.
Boby Tamang est une femme transgenre du Népal.
« Il n’y a personne comme moi dans mon village, confie-t-elle en expliquant à quel point il faut se battre chaque jour contre les discriminations, et je pensais que j’étais seule au monde. »
Qui et où rencontrer quelqu’un qui soit comme soi ?
Où s’aimer ?
Où vivre une relation durable ?
Il y a des couples, photographiés très tendrement, et des personnes regardant fixement le photographe comme si elles criaient leur besoin de reconnaissance.

Ayant traversé pour son projet de grande ampleur quatorze pays entre 2014 et 2019, Robin Hammond observe chacun dans toute sa singularité, et la beauté de son corps, mais aussi comme une icône, le cadrage surligné du Polaroïd faisant de chaque individu une allégorie de la liberté.
« Je ne pourrai jamais revenir en Syrie, déclare Sally, les portes de mes parents se sont fermées devant moi et si je retournais dans mon pays je serais tué. »

Where love is illegal est un livre magnifique et difficile, pierre jetée dans le mur de la honte édifié par les normopathes agressifs de la planète entière.
Frère de tous, Robin Hammond déclare en fin d’ouvrage : « Je suis cisgenre et pansexuel. »
Le combat est en cours, et encore loin d’être gagné.

Robin Hammond, Where love is illegal, book designer Sybren Kuyper, Editions Bessard, 2022 – 600 exemplaires
http://robinhammond.co.uk/2020/index.html

https://editionsbessard.com/product/where-love-is-illegal-limited-edition/