Presque rien, une grisaille d’homme, par Antonio Jiménez Saiz, photographe

©Antonio Jiménez Saiz

Mais jusqu’où ira Antonio Jiménez Saiz dans la construction/déconstruction de l’unique personnage de sa série La paix, nulle part ailleurs ?

Le voici qui apparaît en une mosaïque de six images sur la couverture d’un quatrième volume, pour disparaître dans les ténèbres des pixels.

Cet homme pourrait basculer, la nuit terminale le guette, il faut l’étai d’une main pour l’empêcher de tomber.

Existe-t-il même encore cet orant austère au visage de prières intérieures ?

N’a-t-il pas été absorbé dans la pluie noire de la mélancolie ?

©Antonio Jiménez Saiz

Les fragments le décomposent, en lui offrant quelques secondes de présence en plus, quand tout est si définitivement précaire.

Il se tourne doucement, d’une motilité proche de la stase.

Regardez-le, empoignez-le, faites-le pivoter sur le socle où il se tient, vous ne trouverez peut-être qu’un peu de poussière agglomérée.

Antonio Jiménez Saiz interroge l’énigme de l’incarnation qui est aussi celle de la figuration.

L’individu reboutonne soigneusement le haut de son imperméable, et contemple l’infini d’un écran blanc, qui n’est autre que celle de son retrait intérieur.

C’est maintenant une statue acéphale, presque rien, un nuage gris.

L’homme-oiseau s’est métamorphosé en une humilité extrême, proche de l’anéantissement.

©Antonio Jiménez Saiz

Le dos est celui d’un Sisyphe éternel, qu’accompagnent les quatrains de l’écrivain Caroline Lamarche : « Ma paume dans ton dos : plus de puissance / que le regard ou la question / qui ouvre ce qui ne veut pas l’être / ou ne le peut. »

Nous sommes peut-être à l’instant où Gregor Samsa se découvre insecte, où mes mains jointes se déplient en petits pas de pattes, où la parole tue est devenue un cri de bête muet.

Il n’y a pas de rédemption, mais le rire énorme de la soumission volontaire, qui est une victoire sur toutes les formes de dominations.

Ce soupçon d’homme se courbant est probablement le dernier des saints.

Antonio Jiménez Saiz, La paix, nulle part ailleurs, texte de Caroline Lamarche, volume 4, 2023 – 30 exemplaires numérotés et signés

https://www.facebook.com/antonio.jimenezalba.507

Pour se procurer l’ouvrage : https://www.enfantsauvagebxl.com/editions-l-enfant-sauvage

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