Le Nord vu du haut, par le photographe Jérémie Lenoir

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Vous aimez beaucoup Light Motiv, cette maison d’édition de livres de photographie située à La Madeleine, près de Lille.

Vous ouvrez sans tarder Nord, la tête farcie de clichés sur le pays de Germinal.

Vous découvrez alors avec stupéfaction un tableau inédit de la Portugaise Vieira da Silva.

C’est bien sûr une illusion : vous êtes tombé sans vous y attendre dans un paysage abstrait du photographe Jérémie Lenoir.

Observateur de l’urbanité contemporaine, de ses mutations et lignes de forces, le travail de Jérémie Lenoir nécessite de prendre l’avion (axe Arras-Anvers).

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Photographiés à plusieurs centaines de mètres d’altitude, les territoires choisis par l’artiste plasticien sont d’une très grande diversité, qu’il s’agisse d’un parking à Lesquin, d’un chantier à Lomme, Beveren ou Gand, d’une carrière, d’une mine, d’une toiture, d’un stade.

Nous sommes à Valenciennes, Béthune, Harnes, Lens, Auby.

Pourrions-nous être ailleurs ? Sûrement pas, puisque sous le regard de Jérémie Lenoir le Nord est aussi le Canada, la Russie ou l’Afrique.

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Cette piste d’atterrissage ? Une toiture à Croix.

Ces bandes de tissus ? Un chantier à Sin-le-Noble.

Ce territoire fantastique ? Un site de stockage à Waregen.

Ces taches sur le mur ? Une friche industrielle à Tournai.

Ce tableau de Paul Klee ? Un site de stockage, à Villeneuve d’Ascq cette fois.

Ces traces dans le désert ? Un chantier à Vendin-le-Vieil.

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Jérémie Lenoir est un enfant aimant les matériaux de construction, et n’acceptant pas, adulte, de ne plus jouer aux Legos.

Le vertige gagne devant chaque image construite sans retouche comme une petite planète en suspension, le temps aboli par la géométrisation des surfaces.

On pense à l’art cinétique mais aussi aux peintures rupestres ou à la tapisserie.

On pense 2015, 2016, mais aussi Préhistoire ou enfance.

On pense pratique sérielle, mais aussi signes kabbalistiques.

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On voit des sables bitumeux, des tôles froissées, du papier peint, mais ce sont peut-être des rides, des champignons, des tas d’épices, ou des immeubles bombardés.

Le systématisme de la verticalité crée un horizon infini de quadrillages et pièces pixelisées.

Jérémie Lenoir photographie-t-il la Terre, la Lune ou une image mentale ?

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C’est le Nord de l’esprit, terra incognita de miniatures et mosaïques, où des humains ne subsistent que le rythme de leurs pas fondus dans une sorte d’atonalité primitive et très complexe.

Dans une postface savante, l’auteur du Milliardaire marxiste, le philosophe bordelais Bruce Bégout, résume : « Friche, Tournai, 2015, exhibe les aplats de couleur d’une sorte de Motherwell géologique. »

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Jérémie Lenoir, Nord, texte de Bruce Bégout, Light Motiv éditions, 2016

Site de Jérémie Lenoir

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