
©Gaëtan Chevrier
Il y a trop de bruit, trop de bavardages, trop de faux-semblants partout.
Trop de luxe, trop de misère, trop de chic.
En sa façon silencieuse, et d’approche précautionneuse du paysage, Les collines boisées, livre de Gaëtan Chevrier, publié aux éditions Sur la Crête (Nantes), est une superbe réponse à l’orgueil et au vacarme contemporains.

©Gaëtan Chevrier
Réalisées pendant l’hiver 2021, les photographies de l’artiste forment un répertoire sensible du territoire de la communauté de communes « Les Coëvrons », en Mayenne, travail issu d’une carte blanche confiée par l’agence TICA architectes et urbanistes dans le cadre de l’étude de renouvellement urbain du quartier de la gare d’Evron.
On pense ici au courant américain des New Topographics, à la rigueur de géomètres des photographes n’imposant pas leur émotion, mais la suscitant pourtant de façon exemplaire par la fermeté du cadrage et de la chose vue, très souvent dans le calme de la chambre grand format.
On pense pour la subtilité des gris à Robert Adams, et pour la qualité de l’ensemble de l’ouvrage aux publications d’Israël Arino.

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La Mayenne est un territoire, voilà sa chance, relativement secret, de chapelles oubliées dans les bois, et de chemins discrets, de granges anciennes et d’étendues végétales unies sans être pour autant monotones.
En s’approchant de ses arbres, de son patrimoine rural, de ses ressources naturelles, Gaëtan Chevrier a donné un visage aussi humble que subtil à un espace géographique sans tonitruance.
L’esthétique vaut éthique, qui refuse les effets, l’épate, le tape-à-l’œil.

©Gaëtan Chevrier
Il s’agirait bien plutôt ici d’une méditation mettant l’esprit en éveil, en rendant intensément présent ce que le regard rapide trouverait d’abord banal.
On pourrait être quelquefois dans l’Ouest américain, mais non, il s’agit bien de l’Ouest de la France, en sa campagne façonnée par le cycle des saisons et le labeur humain.
Le particulier en ses points de vérité se fait universel, Les collines boisées repose des outrances des surmenés du vide.

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Tout est beau dans le simple, tout est lignes douces, tout dialogue en un langage accessible uniquement dans le murmure intérieur du spectateur découvrant les lieux comme s’il arrivait dans un territoire sacré.
Tiens, voici une statue de la sainte vierge, un cours d’eau tranquille, des herbes gelées.
Dans le glacis du paysage reposent le temps, l’évidence, l’absence de soupçon.

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Une vaste catastrophe est en cours, mais, ici, on peut encore rêver en contemplant dans la merveille des détails le livre d’heures de la nature.
Gäetan Chevrier, Les collines boisées, texte Jérémy Gouellou, éditions Sur la Crête, 2021, 44 pages – 150 exemplaires

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