
©Stéphanie Petitjean
Prudents comme les serpents est un titre à la Faulkner, ou tiré d’une prophétie mystérieuse de quelque patriarche de l’Ancien Testament.
C’est aussi le premier livre de Stéphanie Petitjean, qui est un journal spirituel accompagnant un chemin de libération à travers la matière.
Lorsque l’on vit avec une sensibilité exacerbée, il est parfois difficile d’y voir clair, parce que l’on chute à chaque instant, parce que l’on doute, parce qu’il se peut que des épiphanies nous fassent entrevoir une autre existence, plus dense et plus folle encore, plus stable et plus tranchante, plus simple et plus irrémédiable.

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Il y a pour les âmes ayant touché l’absolu des maisons de repos et de feu, ce sont les églises lorsqu’elles n’ont pas oublié de quel désert nous procédons et que la solitude n’est pas le contraire de l’amour.
Sur la route de l’épuisement, on rencontre des yeux non moins cernés que les nôtres, mais qui sont comme des amers de feux grégeois dans la nuit.
Des signes ne cessent d’apparaître et de nous guider, mais il faut peut-être la force de l’art pour les rassembler dans une cohérence.

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Ainsi Stéphanie Petitjean s’est-elle faite photographe, regardant son quotidien pour en mieux lire l’énigme fondamentale.
Des ami-e-s, des voyages, des nocturnes émeraudes.
Qu’y a-t-il tout au bout du bout de la presqu’île de l’être ?
Qu’y a-t-il vrailment dans les salles obscures où dansent encore en gestes saccadés les personnages du cinématographe des origines ?

©Stéphanie Petitjean
Voici les jours mauves où l’on rêve ce que l’on vit, où les corps ont laissé sur les draps leur présence noble et chaude, où les étincelles sont des fleurs de métal s’entrechoquant.
Il y a des récurrences de motifs, comme dans une vaste tapisserie médiévale, des chaises à la paille défoncée, et la nuque d’or des copains de bistro.
Musique, enlacement, tendresse ivre.
Masques, yeux fermés, gestes polychromes.

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Il fait froid, il fait folie, il fait un temps à marcher sur la tête.
Comment es-tu sorti de la cage, toi ?
Quelle heure est-il depuis toujours ?
Quand ai-je embrassé un prince oriental pour la dernière fois ?
Stéphanie Petitjean dispose les cartes de son tarot personnel, et bien malin qui en déchiffrera les symboles.

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Un parapluie s’est retourné, Marie mère de Dieu marche avec un déambulateur, un chat noir saute de dixième étage d’un immeuble.
Tatouages, flashes, ultimes volontés.
Griffures, superpositions, expérimentations.
Et puis, ce sont deux mains qui se joignent, un visage qui change de nature, une prière alors que jeunesse s’abîme dans la mélancolie et les mutilations.

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Une aube liturgique, une lumière spéciale, une stupeur animale.
L’existence a passé, dans les caresses et la misère, puis il a fallu mourir, puis renaître, et tout redécouvrir en accueillant cette fois chaque point de disparate comme une grâce.
L’épreuve continue.

Stéphanie Petitjean, Prudents comme les serpents, graphisme Matthieu Litt, direction de la collection « Angle vif » Emmanuel d’Autreppe, Yellow Now, 2022, 160 pages

©Stéphanie Petitjean
Livre faisant suite à l’exposition éponyme ayant eu lieu à la galerie L’Enfant Sauvage, Bruxelles – automne 2021
Signature à L’Enfant sauvage (Pauline Caplet) le jeudi 2 mars 2023 à partir de 18h

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https://www.enfantsauvagebxl.com/
