Paysages de limbes, par Stéphane Mahé, photographe

©Stéphane Mahé

Il ne faut pas trop phraser les images de Stéphane Mahé, elles se goûtent, comme un bon whisky un soir de grande aise.

Mood, son troisième ouvrage aux Éditions de Juillet, après Terminus Saint-Malo (2015) et Somewhere (2018), est un nouvel ensemble de tableaux photographiques donnant la sensation, alors que le substrat est numérique, de rehauts à la peinture à l’huile.

Il y a quelque chose chez lui de la quête d’un souvenir perdu, comme la recherche d’une origine enfouie dans la nuit de la mémoire.

Séphane Mahé compose des nocturnes, ses scènes d’extérieur sont des films intérieurs, le grain des images évoquant le tremblement du temps.

©Stéphane Mahé

Ses personnages sont des figures de solitude, qui contemplent des horizons comme au jour du Jugement dernier.

Apparaît la statue du Commandeur.

Des lueurs, une maison cernée par la mer, un crépuscule bleu, l’impression est celle d’un drame hitchcockien mental.

Qui habite ici ? Qui fréquente ces limbes ?

Une silhouette passe.

Deux femmes, peut-être des jumelles, sont à l’orée d’un porche rouge, montant des marches appelées Destin, comme dans un film de David Lynch.

©Stéphane Mahé

Voici la vie des marionnettes humaines, automates de chair emprisonnés dans un écran de plein air, comme dans le Sud des Etats-Unis, ou dans cette lande de mer bretonne très à l’ouest de l’Occident.  

Visages furtifs.

Scènes de rêve.

Un enfant court après la lune.

Rosebud.

©Stéphane Mahé

Un homme torée l’invisible, un loup de conte surgit d’un bois, danse des ombres dans un palais palermitain insituable.

On pourrait se noyer.

On songe bien sûr aux grands maîtres de la peinture : Hopper, Boudin, David Friedrich, Corot, Constable.

Nous sommes maintenant, peut-être, dans un jardin japonais rempli de fleurs.

L’amour existe-t-il ?

Y a-t-il autre chose dans le miroir que le reflet de notre propre stupeur d’être au monde ?

©Stéphane Mahé

On peut chercher à s’enfuir, comme dans L’Evasion de Rochefort, d’Edouard Manet, mais le bord du cadre est une lame tranchante.

Dans un poème très doux publié en préface, Yvon Le Men écrit : « ce cheval qui retient son galop / cette robe qui retient son reflet »

Cette retenue fait toute la tension et la pudeur des photographies de Stéphane Mahé, qui sont des énigmes métaphysiques invitant chacun à l’introspection.

Stéphane Mahé, Mood, texte Yvon Le Men, postface Stéphane Mahé, Les Editions de Juillet, 2023, 92 pages

https://www.editionsdejuillet.com/products/mood

https://www.instagram.com/stephane_mahe_/?hl=fr

https://www.leslibraires.fr/livre/21994687-mood-stephane-mahe-les-editions-de-juillet?affiliate=intervalle

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