Every story is a ghost story, par Patricia Morosan et Calin Kruse, photographes

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© Calin Kruse

Les éditions allemandes Dienacht Publishing frappent une nouvelle fois très fort avec deux livres d’une très grande beauté formelle, deux astres surgis de la profondeur d’une interminable nuit plutonienne, Sun Stands Still, de Patricia Morosan, et Hood, de Calin Kruse.

De ces deux blocs de poésie nocturne, Hood est le plus radical. Une simple agrafe, titre et nom de l’auteur en fin de volume, année de publication, nom de l’éditeur, sans aucune autre indication.

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© Patricia Morosan

Calin Kruse compose des presque rien. Son livre est une suite de lignes, de traces, de courbes végétales, de présences fantomales.

Le noir domine, invitant le spectateur à errer en ses pages, à deviner le corps d’une femme renversée tenant une cigarette, à se laisser griffer par les broussailles.

Il y a des cailloux, des feux çà et là, une impression amniotique. Des lucioles.

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© Patricia Morosan

La nuit protège, effraie, grouille de sous-conversations, et d’actes d’amour insoupçonnés.

La neige tombe, le photographe entame un lied dont la tonalité est d’un romantisme absolu.

Tout s’effacera bientôt. Ne resteront que quelques signes mnésiques, la sensation d’un rêve, d’avoir été, le temps d’une course folle dans le théâtre de l’origine, si vivant.

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© Calin Kruse

Sun Stands Still se présente également comme une énigme. Des feuillets cousus, une reliure qui colle encore un peu, une couverture cartonnée présentant une drôle de forme, un esprit, le dessin ténu d’une mitochondrie, ou d’une oreille, entre Fautrier, Dubuffet, et la leçon d’anatomie pour monstres.

Tout commence par un éblouissement, la comète d’une fleur, l’esquisse de visages de lumière, la triade homme-femme-animal. L’innocence d’une brebis.

Nous sommes sur une barque portée par l’onde douce d’une rivière. Il n’y a pas de remous, mais des transparences, des arbres faisant boire leurs frondaisons.

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© Patricia Morosan

On devine des inquiétudes, des fatigues insensées, la rencontre d’inconnus, et des extases possibles.

Parfois l’image s’évanouit, ou semble s’effacer devant nous.

Patricia Morosan construit des apparitions, des attentes, du temps suspendu.

On s’embrasse, on court, l’enfant derrière la vitre se transforme en chevreuil, en pigeon, en vieillard.

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© Calin Kruse

On monte sur des échelles, se perd dans les nuées, ou le brouillard, commence à se déshabiller.

 Réveil d’une vache dérangée par un flash, elle est sacrée.

Christ est un arc électrique, une poupée de jouissance, une ferme bien rangée.

L’espace  qu’invente Patricia Morosan est un territoire de mystère et de désir, où, peut-être, reprendre vie, une sorte de ZAD donc.

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Patricia Morosan, Sun Stands Still, Dienacht Publishing, 2017 – 200 copies

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Calin Kruse, Hood, Dienacht Publishing, 2017

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