
Knights in white satin, de Christopher de Béthune, est un livre de nuits et d’aubes, de solitude, d’amour et de dérives urbaines.
Ecrit en lettres gothiques, le titre de ce beau livre d’expériences en noir et blanc trashé laisse augurer tout un monde de ruines et de d’éblouissements, de nudités rugueuses et de superbes combats.

La vision est d’un romantisme noir et parfois punk.
Les séries du photographe belge sont certes des manières de documenter la vie des invisibles, peuples et objets des marges révélés par le flash, mais elles sont bien plus encore, une vision singulière, sans aucun misérabilisme, d’une sorte de précarité ontologique propre aux vivants qui parlent ou perdent le langage à l’instant de leur chute.
Un cheval blanc se cabre en couverture, c’est une licorne, un fantasme médiéval, un signe héraldique.

Il y a dans les photographies de Christopher de Béthune une tension constante, entre volupté et cruauté, une manière de sculpter la réalité pour en entrevoir les gargouilles inaperçues, et formes fantastiques.
Allusion probable au tube des Moddy Blues, Nights in White Satin (1967), l’œuvre de Christopher de Béthune découvre cinquante plus tard, au moyen d’images floutées, chorégraphiées, survivantes, un monde bien plus déchiré et blessé que concilié et plein d’allant.

Les corps sont incomplets ou malmenés, rapiécés ou tatoués, pliés en deux, cassés, ou cachés dans la rue sous une laine épaisse.
Le principe général est dynamique, de fraternité et d’abandon. Je suis passé, je vous ai vus, je ne vous laisse pas tomber, je pars.
Christopher de Béthune trace au graphite des lignes de vies effritées, des lignes de villes abîmées, et des soleils noirs de mélancolie.
La nuit tremble, un chat blanc apparaît, une vitre se brise, une statue acéphale a crié.

Et l’on fait l’amour sur la pelouse, sous le buffet froid des grands ensembles d’habitations aux mille yeux fondant sur nous, comme des rapaces aveuglés par la beauté des chairs que le désir violente.
Et j’ai deux fois vainqueur traversé l’Achéron ;
Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée
Les soupirs de la sainte et les cris de la fée.

Christopher de Béthune, Knights in white satin, Dienacht Publishing, 2017 – 200 exemplaires

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