
Domesticated Land
(2018). Courtesy of
the artist and MACK
Prises dans le désert californien entre 2012 et 2016, les photographies en noir et gris de l’Américaine Susan Lipper pourraient être des dessins au crayon.
Quelques traits, des objets, des personnages, des matières, des structures, le ciel.
Vous pensiez peut-être avec espoir que le désert était l’un des derniers espaces vierges de la planète, mais à tourner les pages de Domesticated Land rien ne semble plus erroné.

Domesticated Land
(2018). Courtesy of
the artist and MACK
La pollution humaine est omniprésente.
Traces de pneus, décharge de boites de conserves, panneaux, bouts de bois, architectures abandonnées, fils de fer barbelés.
Rien de paisible ici, où patrouillent des militaires en jeep, très armés.

Domesticated Land
(2018). Courtesy of
the artist and MACK
On ne saura rien d’eux, Susan Lipper effaçant à dessein toute indication textuelle.
Sont-ils les figurants d’un film en train de se tourner ?
Quelle est la menace imposant leur présence ?

Domesticated Land
(2018). Courtesy of
the artist and MACK
Quelle différence entre le désert irakien et les étendues de sable et de pierre californiennes ?
Y a-t-il ici un travail de collage ou de montage ?
Passent quelques touristes nonchalants, habillés comme dans Zabriskie Point (Michelangelo Antonioni, 1970).

Domesticated Land
(2018). Courtesy of
the artist and MACK
Ils observent, déambulent, s’ennuient, s’arrêtent devant une caravane, un panneau solaire. Le petit chien qu’ils ont emmené a soif.
Cadre dans le cadre comme à la fin de Profession Reporter (1975).
Suan Lipper construit des images-temps, photographiant des routes, des trajets, des possibilités de chemins et d’habitats précaires.

Domesticated Land
(2018). Courtesy of
the artist and MACK
Indifférent, menaçant, se dresse un organisme de fer armé d’antennes de télécommunication.
Rien de spectaculaire dans les images de Susan Lipper, mais un ensemble de signes qui effraie, quand la liberté d’aller et de venir est aussi celle de salir et de détruire.
Les soldats en treillis sont en conciliabule, non loin d’un écran de cinéma de plein air attendant son heure de rêve.

Domesticated Land
(2018). Courtesy of
the artist and MACK
Le monde premier est ici devenu monde dernier, avant que le renversement terminal de toutes choses ne recouvre le tout de poussière, de terre et de sublime vengeance.
Les ciels, la ligne d’horizon, l’au-delà des collines sont des appels.
Susan Lipper nous offre quelques pages blanches, comme un aveuglement nucléaire, comme une responsabilité incombant à chacun de ses spectateurs – homo demens – d’inventer la suite, entre menace, silence et désir de beauté.
Susan Lipper, Domesticated Land, MACK (Londres), 2018, 98 pages

Domesticated Land
(2018). Courtesy of
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