Comme le rêve d’un cheval, par David Jiménez, photographe

Aura_diptico 239, 2018
© David Jiménez

Le feu, ses volutes, ses dragons, sa puissance de destruction, de purification et de métamorphose, est l’élément premier de la poétique de David Jiménez.

Les premières photographies de son dernier opus, Universos, montrent ainsi de façon métaphorique, sur un papier plus fin que le reste des pages, l’incandescence baroque de son esprit.

Woman with erased face, 1998
© David Jiménez

Photographiant à la limite de l’abstraction des ordres de réalité très différents – des roches, des ciels, des pans de constructions, des végétaux, des mers, des visages effacés, des sculptures, des corps heurtés -, David Jiménez cherche moins la dissemblance et la brisure que la sensation de correspondances et d’échos entre des objets disparates regardés comme appartenant à une même constellation.

Chaque image fascine, par son évidente présence, son étrangeté, la force de ses lignes, le dialogue incessant entre le noir et le blanc, mais la singularité de chaque composition n’est pas un égotisme, ou maniérisme d’artiste, quand il s’agit avant tout de se mettre à l’écoute d’un flux de résonnances et de bâtir une totalité de sens.

Roma nº C2126, 2017
© David Jiménez

Né à Séville en 1970, David Jiménez l’Andalou travaille la matière photographique avec beaucoup de dynamisme, refusant de se répéter, brouillant les pistes, et relançant sans discontinuer les dés, multipliant les cadrages, les formats, les placements des images sur la page.

Bel effet d’une grotte sous-marine découpée à la verticale par le nylon blanc de la reliure, traits de suspension musicaux créant des intervalles de silence.

Roma_diptico_23_caballo y placa naranja
© David Jiménez

On ne comprend pas toujours ce que l’on voit, David Jiménez inventant, aux franges de la surréalité, des énigmes métaphysiques, telle la rencontre d’une pyramide, d’un feu de bois, d’un papillon et d’une broche en forme de marguerite sur les marches en marbre d’une île inconnue.

L’artiste espagnol montre autant qu’il efface, un visage, un paysage, une peau.

Aura_diptico 119, 2016
© David Jiménez

Des images sont brûlées, des traces s’imposent, logogrammes à la façon de Christian Dotremont, blocs de signes graphiques noirs issus d’un tableau d’Antonio Tàpies, ou de Robert Motherwell rendant hommage aux révolutionnaires espagnols.

La société n’existe plus, engloutie ou recouverte de cendres.

Versus num 1716, 2009
© David Jiménez

Comprenons que le temps est le sujet majeur d’un photographe interrogeant tel un aruspice les statues antiques et la forme des nuages, une croupe de lion en pierre et une stèle romaine, le pli d’un coude et la nuque d’une belle de passage.

Des oiseaux tourbillonnent, le ciel se fend, le doigt du Créateur pourrait apparaître comme chez Michel-Ange.

Versus num 1061, 2007
© David Jiménez

Si tout semble faire scène et se consumer, c’est qu’il faut un théâtre grandiose pour que de nouveaux dieux naissent des flammes et que l’humanité se régénère.

Un cheval ferme les yeux, il ne rêve pas, il pense, espérant peut-être qu’une nouvelle alliance ne s’établisse entre les vivants et les morts.

Aura_diptico 81, 2016
© David Jiménez

Ce qui peut être le sens même d’une œuvre d’artiste de nécessité.

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David Jiménez, Universos, textes de David Campany, Alejandro Castellote, Mario Montalbetti, traduction en anglais de Gregory Dechant et en espagnol de Fernando Quincoces, RM éditions (Espagne), 2019

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Liminal, exposition de David Jiménez à la Galerie VU’ (Paris), du 13 septembre au 26 octobre 2019

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Galerie VU’

 

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