
C’est un astre très noir venu de Pologne, lancé par la maison d’édition radicale et poétique, Blow Up Press, située à Varsovie.
Over.State est un livre du photographe grec Ilias Georgiadis, une œuvre de nuit, d’obsessions, de routes désertes et de grandes joies, d’étreintes et de fuites.
Des visages apparaissent sur fond de ténèbres, des fantômes, des rescapés, des frères.

Il y a de l’implosion dans l’air, et de la révolution, et des destins abandonnés offerts en partage à qui voudra bien les aimer.
Over.State est une cosa mentale, un esprit qui toujours nie, un corps qui veut jouir, et surtout vivre à fond, sans reste.

L’image est griffée, parsemée de zébrures, parce que tout ici est une blessure, une déchirure, une violence.
La vitalité désespérée du photographe s’exprime sans concession, entre traumas et propositions d’alliances sensuelles.

L’angoisse est une pluie d’atomes toxiques tombant sur une autoroute lointaine.
Les pages, qui ont leurs secrets, leurs pudeurs, se déplient, comportant parfois des rabats, ou des pop-up.
Des corps s’étreignent comme au matin du monde.

Che Guevara est mort assassiné de l’autre côté du monde, mais son visage repose entre les mains d’une femme grecque, qui le caresse et le berce comme un petit enfant.
La menace pèse, il faut se faufiler entre les arbres et la police des frontières, il faut être deux, bouche contre bouche, pour franchir les barbelés de la nuit.
Les clandestins marchent sur les fleurs des champs, dont on retrouve le parfum sous les aisselles des amants.

Ne pas s’arrêter, continuer à avancer vers les lumières de la ville, éviter les chiens errants, penser à Michael Ackerman et Lorenzo Castore, garder confiance.
Offre-moi encore tes seins, je suis seul, tu es seule, et tu sais bien que rien ne peut nous arriver lorsque nous nous embrassons.

Il y a des présences spectrales, des arbres en fleur en pleine hiver, des traces de craie sur le firmament.
« Dear Universe, / Hope that you take very good / cave of / or else / I will be mad. / Best, »
On ne sait plus ce que l’on voit, on ne sait plus ce que l’on vit, et l’on ferme les yeux pour ne plus s’égarer.

Over.State est un voyage sans terme, composé de beautés d’insomnies.
Les étoiles, peut-être mortes depuis longtemps, nous informent du passé.
Ma chérie, cette nuit, promets-moi de ne pas me quitter.
Ilias Georgiadis, Over.State, textes Ilias Georgiadis, design Aneta Kowalczyk, Blow Up Press (Pologne), 2019 – 400 exemplaires