Ron Hicks, 1965 En exergue de son dernier très bref récit d’une liaison avec un homme de presque trente ans de moins qu’elle, Annie Ernaux annonce ce qui est la grande question de la littérature : « Si je ne les écris pas, les choses ne sont allées jusqu’à leur terme, elles ont été seulement vécues. » Les…
Étiquette : Annie Ernaux
L’individuel et l’impersonnel, par Annie Ernaux, écrivain
Anna Thomson dans Sue perdue à Manhattan, Amos Kollek, 1997 « Quand je considère l’ensemble de ce journal, je suis frappée par le petit nombre de textes envisagés, portés, modifiés, rarement abandonnés, en quatre décennies. Il me semble que, rassemblés, ils dessinent la matrice d’une autre vie, inconnue à moi-même, sorte de toile abstraite aux lignes…
Ecrire l’homosexualité, par Marcel Proust, jeune écrivain
Jeune homme nu assis, 1855, Hippolyte Flandrin « Pour relever avec ma bouche le coin de vos lèvres, je donnerais ma vie. » (Marcel Proust, 25 ans) On a longtemps cru à la fable d’un double Proust, d’abord le mondain, le salonnard, l’homme des frivolités et des badinages de la conversation, ensuite l’écrivain, solitaire, sérieux, sorte d’empereur…
L’amant arabe, par Patrick Autréaux, écrivain
La femme à barbe, 1631, José de Ribera « Parce qu’il m’apportait quelque chose d’unique, qui ne fut pas l’amour et n’aura pas été seulement le sexe mais une avancée presque chaque fois renouvelée vers une limite imprévue, l’impatience de sa venue, surtout quand il ne venait pas, si elle passait forcément par les étapes…
Elisabeth Jacquet, portrait d’un écrivain en Eva Gonzalès, peintre
Eva Gonzalès « Chère Eva je vous aime, vous, votre esprit, votre talent et votre vocation. » Rencontre avec une jeune femme moderne pourrait être le titre d’un roman autobiographique d’Anne Wiazemsky, d’Annie Ernaux ou de Florence Delay, mais c’est un portrait, par l’écrivain Elisabeth Jacquet (Mon Mari et moi, Avec nous/Le retour), d’Eva Gonzalès (1847-1883), peintre…
Suspendre le jugement moral, par Annie Ernaux, écrivain
« Quand j’étais enfant, le luxe, c’était pour moi les manteaux de fourrure, les robes longues et les villas au bord de la mer. Plus tard, j’ai cru que c’était de mener une vie d’intellectuel. Il se semble maintenant que c’est aussi de pouvoir vivre une passion pour un homme ou une femme. » Exposer une passion…
Une histoire vagabonde de la littérature romanesque, par Philippe Le Guillou, écrivain
Essai de critique subjective sur l’art du roman à travers les siècles, écrit par un lecteur assumant totalement ses goûts parfois hétérodoxes, Le roman inépuisable, de Philippe Le Guillou, est un éloge de la littérature comme capacité d’émerveillement. Entrée particulièrement enthousiasmante dans un domaine romanesque marqué par sa liberté et sa puissance protéiforme, cet ouvrage…
Penser la métamorphose avec Kafka, par Léa Veinstein, chercheuse, écrivain
Comprendre comment l’œuvre d’un écrivain tel que Kafka modifie, inquiète, inspire la philosophie, tel est le sujet de réflexion de Léa Veinstein dans Les philosophes lisent Kafka. Benjamin, Arendt, Anders, Adorno (Fondation de la Maison des Sciences de l’Homme, 2019), qui fut d’abord l’objet d’une thèse soutenue à l’université de Strasbourg. Lisant, avec ferveur, Kafka…
De la fraternité, Albert Camus et Louis Guilloux, une correspondance
« Ce qui équilibre l’absurde, c’est la communauté des hommes en lutte contre lui. Et si nous choisissons de servir cette communauté, nous choisissons le dialogue jusqu’à l’absurde – contre toute politique du mensonge ou du silence. » (Albert Camus à Louis Guilloux – 5 janvier 1946) Dans l’atmosphère de meurtre et de petitesse morale…
La mer oublieuse, les années japonaises de René de Ceccatty, traducteur, écrivain
« Je renonce à la continuité. Je renonce à vouloir donner le sentiment de la continuité. L’énorme masse de mes souvenirs – que, loin de les traquer pour les monter en épingle, je vais élaguer, dépouiller – me convainc que toute tentative d’organisation continue (fût-ce par association d’idées) serait mensongère et même, comment dire ?…
Des femmes, nuement, par Mylène Besson, peintre
Montrer le corps féminin dans sa diversité, sa multiplicité, est un bel enjeu. Dans une vaste fresque au fusain, Mylène Besson a représenté trente femmes nues qui rient, libres, fortes, pudiques, splendides. Si le projet est artistique, il est aussi éminemment politique, des femmes se dévêtant en réaffirmant, dans la fragilité de leur geste même,…
Comme un rêve d’Allemagne, par Brigitte Bauer, photographe
Vivant en France depuis de nombreuses années, la photographe allemande Brigitte Bauer a construit avec Haus Hof land (éditions Analogues) un livre questionnant de façon doucement ironique la notion d’Heimat, de terre natale. Le propos n’est pas explicatif, ou étroitement vernaculaire, mais de portée universelle quant aux notions de racines et de déracinement. L’ailleurs commence…