Le jaune et le citron tranchent sur la rame, par Jacques Cauda, peintre, écrivain, photographe, poète, polygraphe

rêveuse pour qui je plonge
© Jacques Cauda

« Imprimé dans la dignité » sur les presses de la Maison de la poésie d’Amay en Belgique, L’amour la jeunesse la peinture, de Jacques Cauda, est un livre qui se lit d’une traite (42 pages), au comptoir de notre bar préféré ou dans la cuisine au moment du petit-déjeuner, en pouffant, s’exclamant, hoquetant du rire salutaire de l’idiot.

Il faut imaginer son auteur en habit de Gilles (Watteau / de Rais) égaré dans un monde trop petit pour ses grands yeux de rêve, tentant d’appartenir à l’espèce humaine en adoptant ses tics, « des cheveux longs, des lunettes aux verres fumés, deux poignets de force hérissés de clous à têtes octogonales et des chaussures de parachutiste en cuir noir qui tranchaient sur mes bas de pantalon blanc ».

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© Jacques Cauda

Vêtu ainsi, le clown mélancolique est irrésistible. Dans le bus, les filles en collants, c’est l’époque, qui dure, le déshabillent du regard.

Lui, c’est aussi Petit Muscle et Saucisson, ses deux compagnons de dérives, trio d’obsédés.

Points communs ? « La détestation des parents », le goût de Debord plus que des révolutionnaires d’opérette, et l’amour fou pour Sonia, « blonde, des yeux d’un vert précieux, des seins magnifiques, des jambes interminables et un léger accent étranger et un prénom russe ».

Jacques dessine, par exemple « Staline, le cul bien ouvert, l’anus dilaté d’où sortait un phylactère où il était écrit : « Staline était pédé ! » Et pareillement pour Trotski et Mao « cette grosse tarlouze ! » Vous ne riez pas ? Tant pis pour vous.

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© Jacques Cauda

Jacques voit sous les vêtements, peint la réalité à l’aune de ses fantasmes, se masturbe.

C’est Noël, Sonia est là, saoule comme ses trois adorateurs, et la voici ligotée, adorable, gémissante, magnifique. Fous rires communs, ivresse, jouissance de la belle.

Aujourd’hui, l’extase est devenue texte, accord suprême dans le grand concert de la vie, cette Comilédie, qui est un autre livre paru en 2017 aux éditions Tinbad, une ode à la littérature, aux grands vivants, à Paris, aux culs nus, au jazz.

L’invocation à la Muse (premières pages) y est évocation de son con, bougeant Rigodon, rouge Scarlatti(ne).

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© Jacques Cauda

Publié par Guillaume Basquin (sauveur des manuscrits perdus par les sales gosses inspirés), Comilédie se lit comme une affiche lacérée de Villeglé, à l’endroit, à l’envers, littéralement et dans tous les sens. Principe du collage, décollage, assemblage. Machine textuelle, centrifugeuse, saveurs.

Comilédie se chante, se crie, se chuchote.

C’est un corps à malaxer, comme les seins de Sosie, double androgyne de l’auteur, pastille d’or.

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© Jacques Cauda

C’est un texte fou, qui trope, galope, une touffe de poils à écarter.

Trou de la vierge, verge, incarnation.

Exemple 1 : « Pernique le fil’ ou c’est rincé l’œil, et macache pour qu’on s’glaire hors du bid’, on s’est brissetté »

Exemple 2 : « Alors, lecteur, ça biche mon lapin ? ça j’azz à tes tympans ? Oui ? ça modèle tes érects’ ? Oui, oui ? Délicieux, n’est-il pas ! Bon ! Tiens-toi maintenant, mon gros chou, ça va repartir. »

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© Jacques Cauda

Exemple 3 : « Et, en parlant, elle examine le corps et la casquette de cuir de la Gardienne, à la lueur de deux bougies qu’elle lui éteint cinq à six fois de suite sur les bourrelets. Sosie l’imite, les nymphes l’imitent et ils s’amusent (jusqu’à Nun, qui reste attachée, mais qui ne s’est jamais autant amusée) à brûler cette créature. Tsadé propose à Sosie de pendre la Gardienne par les tétons et de lui coudre les trous. »

Voilà, à toi maintenant, lecteur délicieux, de prendre tes aiguilles, ton stylo, tes boites de couleur, tes ciseaux, et de poser les doigts sur le clavier, sur la peau de ton voisin, de ta voisine, puis d’y glisser, autorisé ou pas, la langue.

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Jacques Cauda, L’amour la jeunesse la peinture, Editions Lamiroy, 2017, 42 pages

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Jacques Cauda, Comilédie, éditions Tinbad, 2017, 174 pages – 300 exemplaires

Maison de la poésie d’Amay

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Kafka © Jacques Cauda

Editions Lamiroy

Editions Tinbad

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Borges © Jacques Cauda

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Tondue © Jacques Cauda

Un commentaire Ajoutez le vôtre

  1. quelain dit :

    la nuit remue, et l’aube aussi, midi calciné

    J’aime

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