© Franco Fontana
L’Amérique est un paysage intérieur.
De l’avoir tant de fois vu, tant de fois rêvé, ce pays-continent est devenu une part de nous-même, un fragment important dans l’agencement de nos désirs.
C’est désormais un paysage intérieur, une ressource et une pierre de méditation.
Dans son Amérique, Jean Baudrillard écrivait de façon violente en 1986 : « Cet univers complètement pourri de richesse, de sénilité, d’indifférence, de puritanisme et d’hygiène mentale, de misère et de gaspillage, de vanité technologique et de violence inutile, je ne peux m’empêcher de lui trouver un air de matin du monde. C’est peut-être que le monde entier continue de rêver de lui alors même qu’il le domine et l’exploite. »
© Franco Fontana
Ce n’est pas faux, mais c’est aussi très caricatural.
Chez Franco Fontana, America est plutôt un don du ciel, une lumière qui rédime, un ensemble de lignes faisant penser aux maîtres de la perspective de la Renaissance italienne.
En coloriste subtil, l’artiste italien né à Modène en 1933 a photographié de 1985 à 2001 les paysages urbains des Etats-Unis comme des énigmes métaphysiques, accordant aux ombres de ses personnages une valeur de dédoublement venant donner à chaque scène un léger aspect spectral, comme si l’Amérique était l’équivalent contemporain du Purgatoire médiéval et que chacun était en attente de jugement.
© Franco Fontana
Pour le moment, avant la grande sélection des élus et des damnés, règne un grand calme, une paix.
Chaque chose semble à sa place, la proxémie chère à Edward T. Hall est respectée.
Il y a chez lui une clarté géométrique donnée par les aplats de couleur, l’organisation des formes dans l’espace et l’ordre symbolique façonnant le spectacle de la réalité.
La silhouette des femmes, souvent très belles, hypnotiques, irradie nombre de ses compositions, parce que ce sont des nymphes ou de lointaines amies de la Gradiva de Wilhelm Jensen ayant traversé l’Atlantique.
© Franco Fontana
Le vide pourrait être angoissant, il est au contraire structurant, en quelque sorte plein.
Dans la préface du livre America, publié par Contrejour, Muriel Adrien évoque les rythmes géométriques de Paul Strand, et les champs chromatiques de Rothko, voire de Barnett Newman, ce qui est une façon d’indiquer qu’ici l’esprit règne, comme l’ambition d’atemporalité.
Qui est mort ? Qui est vivant ? Qui est réel ? Qui est puissance d’abstraction ?
Le rêve américain est peut-être d’abord pour Fontana une vision d’architecte, ou de sculpteur de lumière.
Franco Fontana, America, préface de Muriel Adrien, français-anglais, conception, graphique, mise en page Isabelle Nori, Editions Contrejour, 2020, 94 pages
© Franco Fontana
Exposition à l’Atelier 36 Bastille (Paris), du 12 novembre 2020 au 19 décembre 2020 (vérifier les dates) – direction Franck Landron
© Franco Fontana
Étonnant ! Entre rêve et réalité…
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