@Jansson, Kjell-Åke
« Le besoin le plus fondamental de l’être humain, écrivait Simone Weil, est celui de l’enracinement. »
Nous errons, nous nous perdons, nous nous cherchons, rien de plus humain, de plus ontologique même depuis notre expulsion du paradis maternel, mais nous avons toujours besoin d’un socle, d’une parole confiante, d’un regard aimant, d’un lieu, d’un ancrage d’un partage de peaux.
@Jansson, Kjell-Åke
Le temps est désormais désaccordé, désarrimé, défait, et nous tombons chaque jour davantage.
« Time is out of joint », clamait Hamlet l’extralucide, c’est-à-dire l’unité entre les visages et les roches, les yeux et le paysage, le vent du ciel et le souffle de l’homme, le geste libre et la faveur des divins.
La pandémie de Covid-19 demande, pour ne pas en être le serf, une énergie psychique de plus en plus démesurée.
@Jansson, Kjell-Åke
C’est la chance des amours flamboyantes ridiculisant son pouvoir de nuisance, le bonheur de l’écart, du bond hors du rang des meurtriers.
Oui, mais pour les envoûtés de la société d’info-consommation, et les plus vulnérables, chassés de toutes parts ?
Où trouver un abri, un refuge, un repli, un baiser ?
@Jansson, Kjell-Åke
Dans un livre peut-être, titré När skuggan faller par le photographe Kjell-Åke Jansson, comme une arche ultime, une nef des fous, un chemin d’espoir abrupt, un cri dans l’océan des calculs égoïstes.
Les forêts, ô doux Värmland, sont ravagées. Pollutions pluies acides, malfaisances.
Les esprits les ont quittés, nous sommes seuls, couchant désormais dans la rue, sur des cartons, des pans de palettes en bois fracassées.
@Jansson, Kjell-Åke
Nous ne savons plus naviguer, car nous ne savons plus habiter.
Même les fantômes ont fui.
« Notre besoin de consolation est impossible à rassasier », répétait le grand Stig Dagerman, qui avait compris le peu de puissance des prières dans un monde largement impardonnable.
Mécanisation, extractivisme, destruction du sauf, prédation.
Les photographies de Kjell-Åke Jansson montrent cette désolation ce tunnel des maudits vivant dans la rue, dans les supermarchés cyclopes, ou/et derrière l’écran de leur Smartphone.
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När skuggan faller est un livre de poche, pour ne pas oublier les conditions de la vie nue, et tenter, peut-être, de sortir du village des damnés, par la pensée méditative, la folie d’amour, la poésie d’art qui est une lutte contre la Bête, une guerre intime, anti-spectaculaire, spirituelle.
Ô la la vie en rose,
Le rose qu’on vous propose.
Pas ici.
Kjell-Åke Jansson, När skuggan faller, When the Shadow May Fall, design Gösta Flemming, Journal, 2020
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Journal – maison d’édition suédoise