©Guillaume Zuili
Il y a des lieux incroyablement denses, et pourtant relativement discrets, ainsi le Perche où la galeriste et commissaire d’exposition Christine Ollier a créé une plateforme culturelle particulièrement dynamique, Le Champ des Impossibles.
Invité permanent, Guillaume Zuili, photographe français installé en Californie, est en passe de devenir un enfant du pays.
Paraît aujourd’hui un deuxième volume présentant son travail en ces lieux qui ne cessent de l’inspirer, dans la collection Les Carnets initiée par Filigranes Editions.
Le voici discutant nécessité photographique avec Christine Ollier, autour d’une table en chêne, dans une ferme, un bistrot, ou simplement dans un bois lors d’une promenade, ce qui est parfait.
Eloge de l’indépendance, des amitiés choisies, de la magie du laboratoire et de l’expérimentation chimique.
©Guillaume Zuili
« J’ai débuté en devenant assistant d’un photographe (Rachid Kim Meissane) qui m’a fait travailler au labo dès le premier jour. J’ai appris à développer les films et surtout à lire les négatifs, à les comprendre et à décrypter toutes leurs nuances de gris. Après, il me donnait un négatif par jour à tirer… Un. Et je faisais test sur test jusqu’à ce que le tirage soit satisfaisant… Je n’ai jamais arrêté depuis. J’avais ouvert une porte que je ne pouvais plus refermer. (…) Je me demande parfois si je ne suis pas plus un tireur qui fait des photos qu’un photographe qui fait des tirages… »
Peut-être, mais nous sommes surtout nombreux à reconnaître un œil exceptionnel, magnifié par l’utilisation du révélateur Lith (voir récemment dans L’Intervalle les travaux de Ian Dykmans).
« Je suis d’une génération qui a été abreuvée de cinéma américain depuis le berceau. Vivre à L.A., c’est comme si mes souvenirs d’adolescence ressurgissaient à tous les coins de rue. Le terme de souvenir est d’ailleurs à double usage. Je photographie principalement les restes d’une Amérique qui n’existe plus, un monde singulier, unique, qui disparaît jour après jour… »
Comme dans le Perche, terre d’enchantement et de paganisme sorcier ?
©Guillaume Zuili
Les lumières de Zuili sont celles d’un western interminable, d’un âge d’or qui n’en finit pas.
« Les films noirs, comme The Asphalt Jungle, de John Huston, m’ont marqué par leur esthétique et leur univers. Je me souviens encore de The Public Enemy avec James Cagney. La scène finale de l’incendie dans une raffinerie de pétrole est toujours gravée dans ma mémoire. Il y en a tellement d’autres… Mais presque tous ont en commun le fait d’être en noir et blanc. Et quel noir et blanc ! Une lumière incroyable, des noirs à couper au couteau, des compositions fulgurantes… Voilà la source. »
Des visages apparaissent, figurants ou premiers rôles, comment savoir ?
Saisir Le Perche à la façon Edward Sheriff Curtis, telle est l’ambition de l’artiste renouant avec ses racines françaises, comme un Indien saluant pacifiquement d’autres Indiens.
Guillaume Zuili & Christine Ollier, Rencontre, conception graphique Corinne App, Les Carnet, Filigranes Editions / Art Culture & Co et Le Champ des Impossibles, 2021, 64 pages
Guillaume Zuili est représenté par la galerie Clémentine de la Féronnière (Paris) et diffusé par l’agence VU’
Galerie Clémentine de la Féronnière
©Guillaume Zuili