©Olivier Cornil
« Etre ailleurs et avoir l’impression, un instant, que tous ceux qui m’entourent se ressemblent. Avoir peur de m’y perdre. Basculer dans une autre dimension. Me faire happer. »
Homeland Vladisvostok est un livre en deux parties d’Olivier Cornil, que séparent les notes de son journal (la campagne belge, Puntas Arenas, Reykjavik) : d’abord, en majorité, des photographies du pays natal, de la Belgique, puis de voyages dans diverses régions du monde.
Mais, alors, Vladivostok ?
©Olivier Cornil
Quelles différences entre ici et là-bas ? Quelles similitudes ? Est-il possible d’être de deux nationalités aussi antagonistes géographiquement ? L’identité n’est-elle pas une vaste blague ? Le hasard de notre naissance vaut-il certificat de moralité ? Peut-on vivre sur plusieurs portées musicales à la fois ? L’exil n’est-il pas le premier de nos visages ? Faut-il brûler son passeport ?
Ici, c’est la glaise, les ciels lourds, les chevaux de trait plantés dans le paysage comme des amers sur le rivage.
©Olivier Cornil
Ici, ce sont des forêts de pins, des étendues de neige, des halliers vert-gris, des pavillons proprets comme des isbas, des travailleurs en tee-shirt regardant l’horizon, des enfants courant dans les champs.
Ici, c’est l’étrangeté des polders, les infrastructures fantastiques des usines dont on ne comprend pas vraiment l’utilité, des paysages industriels, et des visages graves comme ceux de lords endimanchés.
Ici, on descend les capuches sur les yeux, on boit des tisanes dans des mugs à tête de chat, on rêve d’être un pirate féroce.
©Olivier Cornil
Ici, la pollution est infernale.
Ici, les cerisiers en fleurs sont aussi beaux qu’à Kyoto.
Ici, la grande roue de la fête foraine fait mijoter le ciel.
Ici, c’est la ruralité du Middle West américain, des bêtes à corne, la majesté des cerfs, les chevaux presque sauvages.
©Olivier Cornil
Mais, attention, la Belgique est un état d’esprit, un état de paysage, autant qu’un espace géographique.
La Belgique n’est pas que la Belgique, c’est aussi l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas (partie 1), comme Vladivostok n’est pas Vladivostok (partie 2).
Homeland Vladivostok est un beau leurre, l’auteur n’ayant jamais mis le début d’un orteil dans la grande ville russe, terminus du Transsibérien.
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Car Vladivostok est le nom d’une cosa mentale, le nom de l’ailleurs, de l’autre absolu, de l’inquiétante étrangeté, et de la surréalité fantasque.
Une tôle étrangement déformée.
Un arbre argentin aussi noueux qu’un vieil homme de Bruxelles.
©Olivier Cornil
Une petite lumière au fond d’une image.
Un chien allongé sur le toit d’une voiture.
Des mains de zombie, des drapeaux chinois, une église islandaise.
Le vrai pays d’Olivier Cornil est ainsi mois celui d’une géographie réelle, que celui du monde flottant des images associées dans l’imaginaire.

Olivier Cornil, Homeland Vladivostok, maquette Olivier Cornil, Emmanuel d’Autreppe, Delphine Vanseveren, éditions Yellow Now, Angles vifs n°15, 2013, 160 pages
©Olivier Cornil
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