Ykpaïha, fleur de paix féminine, par Yelena Yemchuk, photographe, artiste visuelle

©Yelena Yemchuk

Composé de photographies, de dessins et des archives personnelles de Yelena Yemchuk, Ykpaïha est, après le remarquable et remarqué A Sensitive Education, de Francesca Todde (article dans L’Intervalle le 3 avril 2020), le nouveau livre des éditions milanaises Départ pour l’Image.

Née à Kiev, ayant grandi et étudié aux Etats-Unis – à la Parsons School of Design et au Art Center College of Design de Pasadena, CA –, Yelena Yemchuk a construit un livre en trois chapitres, le premier se situant à la fin du livre, et le troisième au début.

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Il faut comprendre que si la guerre est maintenant associée à l’Ukraine (ce que signifie Ykpaïha), le temps de l’enfance est le plus important, le plus fondateur, à qui il faut accorder la place finale, qui est au fond la première.

On se souvient peut-être du livre de Ykpaïha la frontière (éditions Lamaidonne), de Joseph Charroy, relatant un voyage en couple, insouciant et émerveillé, ayant eu lieu l’été 2013 dans ce pays de « l’entre-deux », mais ici le voyage est avant tout de l’ordre d’une très belle traversée mémorielle dans un monde de grâce et de dangers.  

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En six papiers différents, comme autant de strates de conscience, Yelena Yemchuk évoque à la fois sa vie et son pays, son ouvrage étant éminemment féminin.

La médiatisation de la guerre ne cesse de rappeler et de valoriser le yang masculin, la photographe travaillera quant à elle avec le yin de la présence des femmes.

Et de fait, son livre, dont l’acronyme est YYY, est d’une grande sensualité, la couverture montrant deux jeunes femmes assises sur un banc, dont les jambes nues sont une invite à découvrir au plus vite l’alphabet corporel ukrainien, variante de si troublant alphabet cyrillique.

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Il faut se battre, oui, la menace est pressentie depuis l’enfance – les dessins affrontent des monstres, à la fois drôles et inquiétants -, mais la vie, nous rappelle l’artiste, est d’abord un miracle de formes, de visages, d’expériences initiatiques.

Le nez saigne, puis les cuisses, puis le cœur quand il s’agit d’aller affronter au combat un frère humain.

Dans la mémoire dansent des images, des scènes à la plage, des endormissements précaires, des jeux de masques et de travestissements.

©Yelena Yemchuk

La nature composite du livre de Yelena Yemchuk, donnant de l’Ukraine une vision tendre et légèrement surréaliste, permet de souligner la dimension onirique des souvenirs.

La petite fille grandit, découvre, dans l’épanouissement de sa fleur d’or intime, sa pleine féminité.

Le désir est à la fois étranglement et élargissement.

©Yelena Yemchuk

Nous avançons sur la scène d’un théâtre où, à trop contempler Diane se dévêtant, il se pourrait bien que les spectateurs ne deviennent cerfs promis à la dévoration.

Des yeux verts, un casque militaire, la guerre approche, il faudra vite s’en débarrasser.

Ykpaïha est une fleur de paix, subtilement érotique, mise à la boutonnière du temps.

Yelena Yemchuk, Ykpaïha, texte Luca Reffo, Départ Pour l’Image (Milan), 2022 – 1000 exemplaires

https://yelenayemchuk.com/

©Yelena Yemchuk

https://departpourlimage.com/

©Yelena Yemchuk

https://departpourlimage.com/UYY-Yelena-Yemchuk-Coming-Soon

Lancement / signature du livre en présence da la photographe, au Bal samedi 23 Juillet 2022 à 18h

https://www.le-bal.fr/2022/07/yelena-yemchuk-uyy

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