Dans le jour et la nuit transfigurés, par Philippe Ciaparra, photographe

97984352_251594876168528_5277762955578966016_n
© Philippe Ciaparra

Paysages & Transfiguration, de Philippe Ciaparra, est un voyage intérieur de l’ordre d’une cosa mentale.

A la jonction de la terre et du ciel, des dernières clartés du jour et du début du mystère, les photographies de cet artiste travaillant généralement pour la mode sont de l’ordre du sublime, notion romantique affadie par l’usage, mais gardant chez lui toute sa puissance d’effroi, de terreur, et de grâce.

Si les lieux qu’il photographie sont repérables sur la carte du monde, en Europe et en Amérique du Nord – Badlands, Dakota du Sud, Etats-Unis ; Dempster Highway, Yukon, Canada ; Colombie Britannique ; Bryce Canyon, Utah, Etats-Unis ; Montana ; Grand Canyon, Arizona… -, ils sont bien davantage que des bouts de territoires identifiables par satellite.

96669119_526273448051017_2227161003647303680_n
© Philippe Ciaparra

Ce sont des champs de force, des souverains assurés de leur royauté, et des surfaces de projection semblant cartographier la psyché de leur regardeur.

Il fait parfois froid, très froid, il faudra bientôt aller chercher en soi le feu, comme dans une nouvelle de Jack London.

En noir & blanc, apparaissent des paysages premiers, la puissance d’un arbre pelé défiant la roche, des géants étiques en conciliabule, figures shakespeariennes de la désolation et du rire bouffon.

96586059_1437975773256994_6438364986992492544_n
© Philippe Ciaparra

Après les premières images, voici le carton d’un film sans parole, annonçant le titre de l’ouvrage – couverture tissu vert empire -, et le nom du producteur, k éditeur (soit Rina Sherman), dont on ressent l’ambition très belle : offrir à un auteur élu l’écrin le plus parfait pour mettre en valeur son travail.

Paysages & Transfiguration est ainsi un reposoir, autel portatif consacrant la gloire de ce qui est, dans le dépassement de ce qui est.

Dieu n’est pas nommé, mais comment douter de la Présence, quand tout est variations de silences et manifestations d’éternité, jusque dans la destruction ?

96631593_726515998096855_1523116877721632768_n
© Philippe Ciaparra

Il a beaucoup neigé, tout est désormais, dans la paix du paysage advenue, solitude et amour.

Sur la page, il y a quelquefois des mots, des citations (Melville), des légendes, c’est-à-dire au sens fort des extraits de fables : « Pour toi, m., mon adorée, qui a lutté et qui a vaincu.»

Cathedral Valley (Capitol Reef, Utah, Etats-Unis) joue de ses grandes orgues. La musique est lointaine, célébration du pur manifesté en sa géostructure.

96821562_550850468959879_4959651448271929344_n
© Philippe Ciaparra

Les crêtes montagneuses sont des dorsales, et le moutonnement des plaines battues par le vent des vallées creusées sur la langue même de Moby Dick.

Brooklyn est un vaisseau fantôme, mur de briques rouges enténébrées, comme, bien loin de là, la collégiale augustinienne de San Gimignano, en Toscane.

Epopée des exilés invisibles, entre Varsovie et Manhattan.

Voici maintenant la Pologne, sainte et maléfique, esseulée, niée, effacée, dans le désordre de l’Histoire.

96530731_1124756927923916_4732350629232508928_n
© Philippe Ciaparra

Est-ce Marseille ce pan de parallélépipède saisi au crépuscule ? Non, c’est le rêve marocain d’un Paul Klee égaré au royaume des ombres.

Les Anciens pensait que l’entrée des mondes inférieurs se situait dans la bouche des volcans, ou du côté de quelque entité naturelle puissante, tel le lac Averne en Campanie.

Quand il photographie Zabriskie Point, dans la Vallée de la Mort, en Californie, Philippe Ciaparra n’y contemple pas un lieu hautement touristique, mais les dépressions d’un lac asséché menant aux séjours souterrains.

Il y sur les parois de Horseshoe Canyon des inscriptions indiennes montrant des hommes-oiseaux dont on peut deviner qu’ils sont des messagers psychopompes.

Ces pierres sont-elles des roches sous-marines ? Ces bosquets des coraux ? Ces trois arbres dans la plaine des divinités supérieures ?

96599569_292890275044218_4064687676622635008_n
© Philippe Ciaparra

La ferme prend feu, le paysage prend feu, et tout se métamorphose une nouvelle fois.

Dans le massif provençal de la Sainte-Baume, il y a des arbres préservés dont on peut pressentir qu’ils sont des gardiens de mémoire.

sssssss

Philippe Ciaparra, Paysages & Transfiguration, k editeur, 2019 – format 30 x 30 cm, 96 pages regroupant cinquante photographies en trichromie sur papier Munken Lynx non couché, couverture tissu vert empire avec incrustation d’image, 200 exemplaires

k éditeur

ff

Philippe Ciaparra – site

Se procurer Paysages & Transfiguration

Laisser un commentaire