Exorcisme 3, 2020, Bruno Perramant ©Thomas Lannes / Courtesy de l’artiste et galerie In Situ – fabienne leclerc, Grand Paris
La peinture de Bruno Perramant est l’une des plus importantes de notre temps.
C’est un vortex de feu, nourri de paroles et de vibrations fondamentales, de ce que la littérature peut lorsqu’elle se nomme Dante ou Melville, de ce que le cinéma peut lorsqu’il se nomme Godard ou Debord, de ce que la peinture peut lorsqu’elle s’appelle Le Greco ou Goya.
Bruno Perramant jongle avec le mal et le salut, les montagnes et les phrases, les noyades et les orgies.
Feu pâle n°2, 2019, Bruno Perramant ©Rebecca Fanuele / Courtesy de l’artiste et galerie In Situ – fabienne leclerc, Grand Paris
Il s’agit de toucher le cœur indemne du temps en traversant l’époque et ses désastres, ses vilénies, ses fanatismes, ses fantasmes bas.
Pour cela, il y a l’arme des couleurs et des formes qui sont des pensées en actes, une façon d’approcher les monstres de la déraison et de les retourner en pouvoir de clarté.
La peinture de Bruno Perramant est enragée, c’est une tempête dans la palette comme Hugo décrivait celle sous le crâne de l’ancien forçat Valjean.
The god rush 3, 2021, Bruno Perramant ©Thomas Lannes / Courtesy de l’artiste et galerie In Situ – fabienne leclerc, Grand Paris
Parce que l’amour manque, parce que le froid gagne, parce que la pensée calculante mène au péché de lucre, et qu’il faut trouver des gestes de désensorcellement, escalader à mains nues le mont Olympe afin d’y interpeller Zeus pour lui demander la justice des éclairs.
On peut voir actuellement à la galerie In Situ Fabienne Leclerc (Paris) les dernières foudres de cet aventurier du feu intérieur, des huiles, mais aussi des bois peints, tels des astres fossilisés, caillots de sens persistant dans l’espace alors que les corps chutent.
Les soleils sont des yeux de mélancolie, gouffres blancs dont la masse de spermaceti est un combustible rare.
La tête jaune, 2019, Bruno Perramant ©Thomas Lannes / Courtesy de l’artiste et galerie In Situ – fabienne leclerc, Grand Paris
Cupidon et Psyché inventent une danse entre l’âme et le désir alors que Saturne continue de dévorer chaque nouvelle nuit d’insomnie les enfants perdus de Prométhée.
La peinture de Bruno Perramant chante un hymne écossais, réservoir de la cornemuse posé contre le cœur à l’instant d’une impossible catabase donnant la clé de son art : descendre aux royaumes souterrains muni de protections supérieures, afin d’en ramener des secrets de guérison.
Yannick Haenel, qui offre à son ami un texte lumineux, connaît bien ces voyages infernaux, l’équilibre à maintenir entre chemins de sauvegarde et sentes de perdition, la dimension résurrectionnelle de la parole comme ses maléfices.
Nous sommes nés troués, Dieu est un tapis de prières tendu comme une raie crucifiée, l’art véritable est un arbre séfirotique.
Le trou, 2020, Bruno Perramant ©Thomas Lannes / Courtesy de l’artiste et galerie In Situ – fabienne leclerc, Grand Paris
« Où nous mène la peinture, questionne l’écrivain, sinon vers un élargissement de la substance scintillante du monde ? »
Cet élargissement est une augmentation, mais c’est aussi un dépouillement, une ascèse, un soulèvement du négatif, la jubilation d’un os.
Exorcisme 1, 2019-2021, Bruno Perramant ©Thomas Lannes / Courtesy de l’artiste et galerie In Situ – fabienne leclerc, Grand Paris
Bruno Perramant, Love’s Missing, texte Yannick Haenel, 2021
Bruno Perramant – galerie In Situ
L’âge d’or, 2020, Bruno Perramant ©Thomas Lannes / Courtesy de l’artiste et galerie In Situ – fabienne leclerc, Grand Paris
Exposition à la galerie In Situ Fabienne Leclerc, du 19 mai au 26 juin 2021