Sicile, divin bien, par Marco Rigamonti, photographe

©Marco Rigamonti 

Périple sicilien, de Marco Rigamonti, est un voyage dans l’ocre et le silence, dans la quasi-absence des humains et la grâce de toute chose.

Pour la beauté des vides, les aplats de couleurs et l’impeccable ordonnancement des objets de la réalité dans l’espace, on pense à Luigi Ghirri, et aux photographes italiens du Nord découvrant le Sud.

Publié par Filigranes éditions et Postcart Edizioni, cet ouvrage est composé d’images relevant du registre de la noblesse du regard.

©Marco Rigamonti 

Les murs s’effritent, les balcons sont rouillés, les bois usés par le soleil, mais tout procède, jusque dans les ruines, d’un sentiment de grandeur immédiate et d’énigme métaphysique.

Des voiles oblitèrent la vue, des autels baroques apparaissent en arrière-plan, Dieu est là, dans le blanc et l’or, dans la poussière et la chaleur accablante.

Des statues sont tombées, des pierres sont descellées, il y a parfois des trous, des béances, des fissures, par où le sens pourrait s’enfuir alors même qu’il se transmet depuis cette ouverture.

L’ordinaire n’est pas le contraire de la sacralité, mais sa possibilité, son évidence.  

©Marco Rigamonti 

Il y a des incongruités, des détails surréalisants, un homme minuscule tenant, à la façon du Monsieur Hulot de Jacques Tati, un tuyau d’arrosage sur le toit de sa maison, et des joueurs de football sur le sable, regroupés entre deux blocs de pierre posés dans le jour comme des sucres géants.

L’herbe est sèche, brûlée, on pourrait être avec Richard Serra dans la forge d’Héphaïstos.

Les temples se sont écroulés, mais le divin ne s’est pas effondré, ayant gagné assurément en simplicité.

Entre les habitations aux façades jaunes pousse un palmier farcesque, rectiligne comme un fil à plomb inversé emmenant le visible dans le ciel.

©Marco Rigamonti 

On a construit ici, on construira, mais chacun sait bien que le temps ne laissera de l’effort humain que quelques tas de cailloux pour l’ambition des futurs architectes, frères de Sisyphe.

Très attentif aux formes dans l’espace, Marco Rigamonti dessine la Sicile en la photographiant, en soulignant les traits et les courbes, les vals et les arêtes, les simulacres et les mises en scène improvisées.

Le périple est réel, mais circonscrit parfois à quelques lieux arpentés en tous sens, dans l’écho des pierres et des végétaux, des ciels et des sculptures blanches, des jeux pour enfants et des demeures solitaires.  

©Marco Rigamonti 

Les images ne sont pas légendées, nous sommes dans un théâtre mental, rempli de cactus et d’enfants espiègles.

L’imaginaire de Marco Rigamonti est syncrétique (monothéiste, polythéiste, animiste) et uniciste/unitaire (la vie en son suspens comme énigme philosophique).

Bien sûr, la Sicile est dans l’imaginaire commun une carte postale, mais c’est aussi, sous l’implacable soleil méditerranéen/camusien, un lieu de refondation.

Marco Rigamonti, Périple sicilien, texte (français/italien) Gaetano Savatteri, conception graphique Claudio Corrivetti, Filigranes Editions/Postcart Edizioni, 2022 – 400 exemplaires

©Marco Rigamonti 

https://www.marcorigamonti.it/

©Marco Rigamonti 

https://www.filigranes.com/artiste/rigamonti-marco/

https://www.leslibraires.fr/livre/20462503-periple-sicilien-rigamonti-marco-filigranes?Affiliate=intervalle

Un commentaire Ajoutez le vôtre

  1. Kebadian dit :

    Très beau même Fabien !

    J’aime

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