Dame à la licorne, joi d’amor, par Yannick Haenel, écrivain

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« Il faudra se laisser aller à l’aventure ; et vivre personnellement le trésor. »

Il fait froid, très froid, d’un froid spécial touchant aussi bien l’espace que le temps, créant une sorte de paralysie générale.

Il y a foule sur les boulevards, mais vous constatez pourtant qu’il n’y a personne.

Vous ouvrez la porte du Musée de Cluny, en plein cœur de Paris, vous passez de salle en salle, vous savez ce que vous cherchez, c’est une chance, car il y va comme à chaque fois de votre relance.

Vous vous asseyez face à la tapisserie que vous êtes venu voir de nouveau, et posez un livre près de vous, sur la banquette.

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Il est de Yannick Haenel, s’intitule A mon seul désir, publié une première fois en 2004, et réédité aujourd’hui en collection de poche afin de rejoindre plus facilement les autres talismans dans votre manteau.

La Misère a failli vous surprendre une nouvelle fois, mais c’était un test, pour vérifier votre degré de lecture, et de vision.

A mon seul désir déploie en phrases et possibilités existentielles l’expérience d’une rencontre avec les six tapisseries de La Dame à la licorne comme autant de Nymphéas aspirant l’ensemble des couleurs du vivant.

A mon seul désir est un livre sur le secret, sur l’abondance, sur la littérature comme érotique, sur la jouissance de la solitude, sur la joie de la déprise, sur le rouge.

La pudeur de La Dame à la licorne est une invitation à la rejoindre au moins six fois, dans une excitation calme ouvrant sur des trésors de nuances.

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Comme une toile de Twombly, du Titien ou de Bacon, la vaste tapisserie – c’est un archipel – rend libre, et multiplie le corps.

Il est là le refoulé absolu du transhumanisme, dans quelques gestes brodés de laine de soie par des maîtres lissiers triomphant du temps dans une capitale sainte sise à l’Occident.

Le poème de La Dame à la licorne met sur le chemin de la désertion, mais, heureusement, la police ne le sait pas encore.

Des aventures arrivent, des coïncidences géniales, une faveur.

L’entrée en littérature est ainsi : la promesse d’un dégagement sans fin.

C’est le passage de la Gradiva.

C’est une longue chevelure tombant sur une poitrine palpitant de bonheur.

« Vivre consiste à ne pas se détourner du foyer d’éblouissements : à ne pas se détourner de ce qui vous éblouit dans les Illuminations de Rimbaud ou dans les films de Robert Bresson – à endurer poétiquement une telle lumière. »

Comme à ne pas se détourner de ce qui élargit votre capacité à aimer.

« Quelque chose n’arrête pas de surgir à travers l’histoire de l’art. Cette chose s’incarne discrètement, elle habite souvent le corps des jeunes femmes. Je l’ai reconnue dans les tapisseries de la Dame à la licorne, où le territoire ondoyant des plis en accueille l’ondulation. Ce sont des nymphes. Ce livre leur est dédié. »

Elle est là, un chemin s’est ouvert.

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Yannick Haenel, A mon seul désir, Argol poche, 2019, 128 pages

Argol Editions

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Se procurer A mon seul désir

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