
Sans soleil est un documentaire de Chris Marker sorti en 1983, film pour lequel le cinéaste se considérait davantage comme un assembleur, un compositeur, un monteur, que comme un réalisateur.
Evoquant notamment le soleil noir d’Hiroshima, cette œuvre de poésie interroge la capacité humaine à surmonter l’impossible.

En nommant leur essai visuel et sonore Même soleil, le photographe Gaël Bonnefon et le compositeur Frédéric D. Oberland, du collectif Oiseaux-tempête, ne cherchent pas à nier la dimension de catastrophe dans laquelle nous vivons, mais envisagent, dans le démonde advenu, des points de lumière, des échappées, des moments de clandestinité formant les signes et espoirs d’une liberté ultime.
Même sans soleil, même absence de soleil, même soleil impur, même atmosphère de contamination et d’irradiation permanentes.

Le son est grave, tragique, envoûtant, parce que nous sommes morts, parce que nous nous noyons, parce que nous nous effondrons dans la poussière colorée d’un mal indicible.
Une pluie noire a recouvert les villes, où se tiennent encore debout quelques figures, anges exterminateurs, fous de Dieu, saints inébranlables ou quidams chanceux.

On se regroupe, on se cherche des yeux dans le lacrymogène, il y a des frères peut-être de l’autre côté de la rue, il faut marcher.
Il faut prendre la guitare, la brancher à l’ampli, produire des sons et des échos comme on entre en hypnose.

Visage d’une femme à l’entrée de la grotte où les derniers rescapés se sont réfugiés, c’est une image mentale.
Des ballons dans le ciel, des globules, des âmes.

Tu t’enfuis ou accomplis l’explosion.
Tu t’envoles ou respires ton propre cadavre, à Sarajevo, à Toulouse, à Tokyo.

Tu es pendu mais ne le sais pas encore, l’arbre était si beau.
Ta vie défile.
Des fêtes interdites, des baisers alcoolisés, des sabbats délicieux.
La guitare a la langue râpeuse, et les gosiers sont secs.

Un événement se prépare, un événement se produit, un événement a déjà eu lieu, qui est un cataclysme.
Solitudes, craquelures, fermetures.
Il faut prier, à genoux, dans l’eau, dans le cosmos du son primordial.
Des regards dans la forêt d’émeraude.

Des orants.
Des errants.
Des dunes de désolation.
Des aubes sublimes.

Dans l’orage,
dans la moiteur tropicale,
dans la jungle des villes,
dans l’étrangeté animale des peaux et des visages,

dans la nudité et la pudeur,
dans l’œil de feu des autours,
Morituri te salutant, Soleil !
Extrait de la vidéo Même soleil – code temporaire d’accès : hello
A paraître, Submit, avec Stéphane Charpentier, aux éditions Sun/sun et Lamaindonne, 2020, et Untold Numbers of People, fin 2020
Exposition Élégie, La vitrine de l’antenne Frac Ile-de-France, Paris – prolongée jusqu’au 19 Juillet 2020
Gaël Bonnefon montrera aussi son travail dans le cadre du festival L’été photographique de Lectoure, juillet/septembre 2020
Publication Photobook, volume 4, Fisheye Magazine, Juin 2020
Exposition Et Omnia Vasistas, galerie Vasistas, Montpellier – reportée en juin 2020