Conversation intime, par Peter Hujar et Moyra Davey, photographes

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John & Goya, 2019 © Moyra Davey / Hudson River (V), 1976 © Peter Hujar

A l’automne 2019, l’exposition Speed of life faisait découvrir à Paris, au Jeu de Paume, la force de l’œuvre du photographe américain Peter Hujar, mort à 53 ans d’une pneumonie liée au SIDA.  

Célébré pour ses portraits en noir et blanc à la beauté quelque peu austère de la bohème et de la scène avant-gardiste new-yorkaises, ayant contribué à la visibilité du monde gay – musiciens, danseurs, plasticiens, travestis -, Peter Hujar dialogue aujourd’hui post-mortem, et de façon souvent impertinente, avec la canadienne Moyra Davey.

The Shabbiness of beauty, que publie MACK, est un livre de consversations en images, Moyra Davey ayant choisi dans les archives de Peter Hujar un ensemble de photographies peu connues, à partir desquelles l’artiste multidisciplinaire a pensé les siennes, en puisant également dans ses propres albums.

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Michele Collison, Hotel Chelsea, 1974 © Peter Hujar

Peter Hujar photographie très bien les hommes, leur dos, leurs fesses, leurs cuisses, Moyra Davey les femmes androgynes et la mer étale.

Un chien nous regarde, il est de Peter, mais les trois poules sont des deux artistes.

On peut s’amuser des correspondances, des contrepoints, des répliques visuelles, ou simplement oublier les noms, regarder les rectangles en noir et blanc pour ce qu’ils sont : des expériences poétiques.

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Eric (Fade), 2018 © Moyra Davey

Des pieds tatoués, deux chatons posés contre le pubis foisonnant d’une femme mince (un travesti ?), un cheval observé en contre-plongée.

New York vue depuis le Word Trade Center (Peter Hujar, 1976), les petits seins de la pensive Jane prenant son bain (Moyra Davey, 1984).

Il y a une continuité secrète entre ces images, entre l’équidé un peu punk et les trois éléphants mangeant du foin (trois poules métamorphosées en pachydermes ?), entre les hommes de l’Américain et ceux de la Canadienne, entre les eaux de l’un (Hudson River) et celles de l’autre.

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Emma (Spider), 2017 © Moyra Davey

Au Chelsea Hotel, on se déshabille pour l’art, on est un enfant qui crie, un dindon aux aguets.

Un bébé qui tète, un chien qui surveille l’horizon, une femme blonde posant nue, le dos couvert de dessins tracés à la façon du maître Hokusai.  

Des poils sous les bras, l’aréole d’un sein, une vague, une bouteille d’alcool.

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Petite Mort,1988 © Moyra Davey

En ce corpus d’images, la lumière est toujours très belle, irradiante, d’espoir.

Un homme est étendu, s’apprêtant à faire l’amour, un autre est debout, trois pages plus loin, déployant son sexe.

Nombre de ces photographies sont des études, d’un escarpin, d’une main, de pieds.

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Leg, 1984 © Moyra Davey

Une grande douceur règne ici, mais aussi une forme de mélancolie, jusque dans l’impatience des corps.

Les animaux – chiens, chevaux, gallinacés -, nous regardent avec compassion : nous portons quelquefois le joug, semblent-ils penser, mais il faut tant d’efforts aux humains pour tenter d’être libres.

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Moyra Davey & Peter Hujar, The Shabbiness of beauty, text by poet Eileen Myles, design by Morgan Crowcroft-Brown, MACK, 2021, 128 pages – the signed edition includes a slip signed by the artist and bound into the inside back cover

MACK – site

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Se procurer The Shabbiness of Beauty

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